Mardi 27 mai 2014, Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, a répondu à la question du député Joël Giraud relative à la lutte contre l'antisémitisme, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement à l'Assemblée nationale.
Joël Giraud, député du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste des Hautes-Alpes
Monsieur le président, ma question s’adresse à Monsieur le ministre de l’Intérieur.
Samedi, à Bruxelles, capitale de l’Europe, le terrorisme lâche et aveugle a encore frappé. Et une fois encore, c’est la communauté israélite qui a été visée.
Au nom du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, mais aussi au nom de tous mes collègues présents ici, sur tous les bancs de l’Assemblée, pour qui la devise de la République, « Liberté, égalité, fraternité », n’est pas un vain mot, permettez-moi de m’incliner devant la mémoire des victimes et de dire à leurs familles touchées dans trois pays – la France, la Belgique et Israël – notre solidarité.
Au-delà de la communauté israélite, c’est un espace d’ouverture en Europe qui a été touché, ce qui en fait un symbole encore plus fort. C’est en ces lieux, au Sablon, que, depuis 1958, l’Église réformée allemande s’est engagée dans des projets en faveur des victimes du nazisme. C’est dans ce bâtiment que, dans quelques semaines, on accueillera les clichés d’Adi Nes, un artiste de Tel Aviv mettant en scène l’homosexualité et l’identité masculine, mais aussi l’œuvre du français d’origine marocaine Mehdi-Georges Lahlou, qui fait dialoguer cultures arabo-musulmane et judéo-chrétienne.
Parce qu’en ce lieu on prône la société de justice contre la société de vengeance, la tolérance contre la haine, nous devons toutes et tous dénoncer de tels crimes, et plus encore lorsqu’on est à la fois européen convaincu et laïc.
Le soir même, en France, à Créteil, deux jeunes hommes dont le seul tort était de porter une kippa étaient sauvagement agressés. Dois-je rappeler ici qu’en 2013, 40 % des violences racistes commises en France étaient dirigées contre des juifs, qui représentent moins de 1 % des citoyens français ? L’antisémitisme en France ne peut plus être considéré comme un phénomène conjoncturel lié aux conflits du Proche-Orient, il s’agit d’un mal structurel qui, n’étant pas combattu comme tel, n’a pu être enrayé à ce jour.
Alors, Monsieur le Ministre, mes questions seront simples, autant que le problème est complexe. Le Président de la République a affirmé, je le cite, la « volonté de la France de tout faire pour que les juifs de France se sentent en parfaites sécurité et tranquillité ».
Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre afin que cette louable intention se traduise dans les faits ? Et au-delà, quelle réponse plus large apporter pour que dans notre pays et dans notre Europe, l’extrémisme soit combattu sous toutes ses formes ? (...)
Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur
Monsieur le député, vous posez une question d’une extrême gravité et je veux vous répondre sans détour. Il faut d’abord rappeler les faits qui se sont déroulés pendant ce week-end. Quatre personnes sont tombées au Musée juif de Bruxelles sous les balles d’un tireur qui, à l’heure qu’il est, n’a pas encore été identifié.
Quelques heures après, deux jeunes juifs, à Créteil, ont été agressés et battus. (...)
Ces actes sont intolérables. Ils témoignent du retour de ces petites haines qui rongent de l’intérieur les valeurs de l’Europe et, en France, les valeurs de la République. Je veux vous dire la détermination absolue du Gouvernement à lutter contre ces haines qui montent, contre l’antisémitisme, de façon résolue, parce qu’il est du devoir de la République, au nom de ses valeurs, en raison de son droit qui se trouve inspiré par ces valeurs, de faire en sorte, lorsque les principes sont enfreints, qu’à tout moment le droit passe. (...)
J’ai pris des mesures, en très étroite liaison avec nos préfets, pour qu’ils assurent la sécurité de tous les lieux susceptibles d’être visés par des actes de violence. Les préfets ont pris contact avec les responsables de la communauté juive pour faire en sorte que des surveillances statiques ou des patrouilles soient mises en place, en vue d’assurer la sécurité. Il faut qu’en France, comme en Europe, tout soit mis en œuvre pour que l’histoire ne soit pas revisitée, pour que les valeurs de la République et de l’Europe partout l’emportent face aux haines qui montent. (...)