Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, a répondu aux questions des députés Gabriel Serville et Bernard Debré lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement, mercredi 14 mai 2014, à l'Assemblée nationale.
Gabriel Serville, député GDR, Guyane
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le ministre, la Guyane n’en finit pas de pleurer ses victimes, notamment sa jeunesse, qui paye un lourd tribut à la violence. Je citerai à titre d’exemple la commune de Matoury, qui a été récemment témoin de deux meurtres et de huit cambriolages en moins d’une semaine. Hier encore, le procureur de la République relevait les difficultés à endiguer et à réguler cette violence.
Certains vont plus loin et parlent, à tort ou à raison, de « zone de non-droit ». Le constat est sans appel et la population est exaspérée. Tous les compteurs passent au rouge et les citoyens en appellent à l’autorité de l’État ainsi qu’à la vigilance de la République.
Pourtant, du fait de sa position géostratégique, de son exceptionnelle biodiversité, de la richesse de son sous-sol, de ses ressources halieutiques, de ses réels potentiels pétroliers, de la présence du port spatial européen à Kourou et, surtout, de la profonde motivation de ses habitants à relever tous les défis du troisième millénaire, nous pouvons, en toute humilité, considérer que la Guyane regorge d’atouts pour se transformer en une véritable locomotive au sein de la France de demain. Monsieur le ministre, c’est une chance collective qu’il ne faut absolument pas rater !
Conscient du travail réalisé par l’ensemble des partenaires institutionnels qui luttent contre ce fléau de la violence gratuite, je tiens à saluer le classement en zone de sécurité prioritaire des communes de la grande île de Cayenne. Toutefois, la Guyane ne pourra s’épanouir et développer l’ensemble de ses potentialités qu’une fois qu’on aura mis un terme définitif à ces problèmes récurrents de délinquance.
Je ne doute pas de l’attention particulière qu’attache le Gouvernement à la situation guyanaise. C’est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir nous éclairer sur les solutions envisagées ou déjà arrêtées afin de rétablir de façon pérenne la sécurité de nos concitoyens. (...)
Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur
Monsieur le député, vous posez une question qui, je le sais, vous tient à cœur. Dans l’exercice de vos mandats locaux, notamment en tant que maire de Matoury – je vous félicite d’ailleurs pour votre élection récente (...), vous avez toujours fait en sorte que les préoccupations relatives à la sécurité et au développement de la Guyane soient exprimées sur ces bancs. Soyez à cet égard assuré du soutien total du Gouvernement, qui s’est matérialisé par de nombreuses actions depuis de nombreux mois pour garantir la sécurité.
Nous avons tout d’abord créé deux zones de sécurité prioritaires : une première à Kourou, une seconde à Cayenne et Matoury qui, comme vous le savez, donne des résultats, puisque les homicides volontaires ont diminué de près de 50 % et les homicides non volontaires de 38 %. Les vols à main armée et les atteintes aux personnes ont également diminué, précisément grâce à la collaboration qui s’est nouée entre les forces de sécurité et l’ensemble des partenaires locaux.
Par ailleurs, nous avons augmenté les effectifs de la gendarmerie. Il y avait 516 gendarmes départementaux en 2012. Nous avons augmenté leur effectif de 25 gendarmes, auxquels nous avons ajouté plus de 400 gendarmes mobiles. Le nombre d’agents des forces de sécurité rapporté à la population est ainsi bien plus élevé en Guyane que partout ailleurs sur le territoire national.
Nous avons en outre engagé une action très forte de sensibilisation au travers de l’opération « Déposez les armes », qui a eu un grand succès en Martinique. Celle-ci vise à faire en sorte que tous les partenaires éducatifs, les forces de sécurité et les représentants de l’État s’engagent avec la population dans une action de sensibilisation à la violence.
Sachez, monsieur le député, que nous sommes à vos côtés pour poursuivre cette action en faveur de la sécurité en Guyane.
Bernard Debré, député UMP, Paris
Monsieur le Premier ministre, il y a un an, les habitants et les commerçants du Trocadéro assistaient à un spectacle de désolation – comme nous avons pu le voir avec Claude Goasguen : vitrines brisées, magasins saccagés, mobilier urbain dévasté. Ces émeutes ont été la conséquence d’une faillite totale de la chaîne de commandement du ministère de l’intérieur, que vous dirigiez à l’époque.
Cela aurait pu servir de leçon, mais aucune conclusion quant aux responsabilités n’a été tirée de cet événement : le préfet de police a été confirmé dans ses fonctions.
Dans une question écrite du 28 mai 2013, renouvelée le 19 novembre, je vous ai demandé de me faire connaître le bilan ainsi que le coût de ces émeutes pour les policiers. Vous n’y avez jamais répondu.
Cette fin de semaine, de nouvelles violences et des interpellations ont eu lieu sur les Champs-Élysées. Ces incidents répétés reflètent votre impuissance à combattre l’insécurité et la violence. Vos annonces, à grand renfort de communication, n’y changeront rien. La réalité est là : les violences contre les personnes augmentent de 5,5 % au premier trimestre 2014 ; les vols à la tire sont monnaie courante à Paris et les cambriolages, dans les villes comme dans les campagnes explosent, avec une hausse de 23 % à Paris.
Votre plan de lutte contre les cambriolages est un échec. Et que dire de votre réforme pénale à venir, devant laquelle les délinquants et les multirécidivistes doivent se frotter les mains ? (...) Insécurité, laxisme, tel est le résultat de la politique socialiste depuis deux ans. Monsieur le Premier ministre, la sécurité est l’une des premières libertés. Quand allez-vous inverser la courbe ?
Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur
Monsieur le député, merci pour cette question, dont je ne sais par quelles données statistiques elle est inspirée, mais qui se veut très polémique sur les résultats obtenus par les forces de sécurité à Paris. Très simplement et très sobrement, je veux vous donner les résultats des actions conduites sous l’autorité du ministre de l’Intérieur par les forces de sécurité à Paris. Vous constaterez que les chiffres sont fort différents de ceux que vous venez de citer.
Pour ce qui concerne le plan de lutte contre les cambriolages, lancé par mon prédécesseur en septembre, je souhaite vous indiquer que, alors que les cambriolages ont augmenté de 44 % entre 2007 et 2012, y compris sur le territoire de Paris (Protestations sur les bancs du groupe UMP), une première inversion est constatée au cours du premier trimestre 2014, avec une diminution de 3,6 %. Voilà qui devrait vous rassurer !
Les coups et blessures volontaires sont en baisse de 2,4 %, de même que les homicides et les violences conjugales. Quant aux atteintes aux biens, l’action résolue que nous menons sur le territoire de Paris permet une baisse du nombre de vols à main armée, (...) avec un taux d’élucidation en hausse de près de 9 points et une diminution significative des vols à l’arraché, de l’ordre de 25 %. (...)
Ces chiffres, qui concernent Paris, devraient être de nature à vous rassurer et vous inciter à aller trouver vos inspirations statistiques dans des tableaux plus fiables. (...)