Rencontre avec le Conseil français du culte musulman

1 août 2016

Déclaration de M. Bernard CAZENEUVE, Ministre de l’Intérieur, à l’issue de la rencontre avec le CFCM le 1er août 2016 à l'Hôtel de Beauvau.


- Seul le prononcé fait foi -

Je voudrais compléter le propos d’Anouar KBIBECH d’abord en le remerciant, et à travers lui le CFCM, pour avoir pris l'initiative très belle, pleine de signification, forte de symbole que nous avons eu à voir hier partout dans les églises de France, d'inviter nos concitoyens de confession musulmane à aller participer avec les catholiques à des messes dans des églises et dans des cathédrales.

C'était là une volonté de manifester la fraternité, la concorde, la solidarité qui doit exister entre tous les Français dans les épreuves terribles auxquelles notre pays est confronté. Et cette initiative – qui était une initiative  symbolique mais qui avait beaucoup de sens – a rassemblé énormément de Français de toutes confessions dans le recueillement et dans la célébration des valeurs de la République.

Et je tenais d'abord à vous remercier pour avoir pris cette initiative, qui était une initiative forte et qui témoignait s'il en était besoin de la volonté des musulmans de France d'être pleinement dans la République, dans le combat contre le terrorisme, dans la fraternité, dans le respect et dans la tolérance.
Le deuxième point sur lequel je voudrais insister, c'est que nous devons – sur la question de la relation de la République avec l'islam de France – avoir des positions claires, fermes et un travail dans la durée qui permet de régler des problèmes qui ne l'ont pas été depuis de nombreuses années, pour ne pas dire depuis des décennies.

Quelles sont ces positions ?

D'abord, il n'y a pas de place en France, et nous nous le sommes encore dit ce matin, pour ceux qui, dans des salles de prière ou dans des mosquées, appellent et provoquent à la haine, ne respectent pas un certain nombre de principes républicains, je pense notamment à l’égalité entre les femmes et les hommes. C'est la raison pour laquelle j'ai pris la décision il y a de ça quelques mois de procéder, soit dans le cadre de l'état d'urgence, soit en   mobilisant tous les moyens du droit commun, soit par des mesures administratives, à la fermeture de mosquées. Ce sont une vingtaine de mosquées et de salles de prière qui ont été fermées. Et il y en aura d'autres, compte tenu des informations dont nous disposons. Je rendrai d’ailleurs publiques les décisions que nous prenons en la matière et lorsque des lieux de culte sont fermés, dans lesquels des individus appellent à la haine ou appellent au racisme, à la xénophobie, à l'antisémitisme, il faut que nous puissions – avec les représentants du culte musulman – aller au bout du travail de refondation de l'islam dans les territoires, de manière à ce que ceux qui  prêchent et ceux qui accueillent des fidèles soient dans le respect des valeurs de la République.

Nous expulsons aussi, ce sont 80 arrêtés d'expulsion qui ont été pris, il y a plusieurs dizaines d'arrêtés d'expulsion en cours d'examen, je poursuivrai avec la plus grande résolution cette politique. Et nous sommes bien  d'accord ensemble pour que cette politique soit poursuivie, parce qu'elle est la condition de la fraternité dans la République et du respect par chacun des valeurs qui fondent la République et la démocratie dans notre pays. Et  puis il y a des questions qui doivent continuer d’être traitées et qui jusqu'à présent ne l'ont pas suffisamment été. Je pense à la formation des imams, nous avons résolu une partie de ce problème en développant 13 diplômes universitaires dans 13 universités, qui permettent de former des imams à la fois à la langue française et au respect des principes républicains, tout cela a vocation à monter encore en puissance. Et puis il y a la question de la   formation théologique, abordée lors de la dernière instance de dialogue qui est le lieu nouveau de la discussion entre l'islam de France et ses représentants et l’État, et consacrée à la question de la lutte contre la radicalisation.

Vous avez créé un Conseil théologique qui va définir un référentiel de la formation des imams, un référentiel théologique et qui permettra sur le volet théologique dans les instituts de formation français – et je pense notamment à l’institut Al Ghazali ou à l'Institut de Château-Chinon mais pas seulement – d'avoir des théologiens de haut niveau qui autour d'un référentiel partagé formeront les imams français, de manière à ce qu'il y ait dans les  mosquées des théologiens de haut niveau qui enseignent un islam qui soit un islam du juste milieu, compatible avec les valeurs de la République.

La Fondation que nous créerons avant la fin de l’année, au cours du dernier trimestre de l’année 2016, et sur laquelle nous travaillons depuis de nombreux mois, permettra de financer la partie culturelle, d’établissements culturels, de financer des thèses, de travailler à une meilleure connaissance de l’islam en liaison avec les plus grandes institutions françaises - je pense aux musées, à l’Institut du Monde arabe - de financer éventuellement des bourses pour ceux qui veulent accéder aux diplômes universitaires, c’est-à-dire à l’enseignement laïque que nous avons développé dans les universités, et puis nous travaillons aussi à la manière d'accompagner dans le respect rigoureux des principes de la laïcité la formation plus théologique des imams, et la volonté aussi de garantir la totale transparence dans le financement des mosquées.

Il y a là un travail technique qui est difficile, sur lequel nous avançons de façon extrêmement méthodique, et qui me conduira à faire des propositions complémentaires au Premier ministre, de telle sorte à ce que nous puissions proposer un dispositif global cohérent dans le courant du mois d'octobre prochain.

C'est la date que je me fixe pour lancer la Fondation et pour présenter une architecture globale qui permette de refonder véritablement la relation avec l'islam de France, c'est le sens du propos tenu par le Premier ministre hier, c'est le sens du travail que nous effectuons ici, c'est le sens de la relation de confiance que nous avons nouée ensemble, et donc c'est un sujet sur lequel, cette maison, qui est le ministère de la relation avec les Cultes, travaille de façon méthodique, de telle sorte à pouvoir parler au moment où tout sera prêt. Merci à vous.