Le 30 septembre 2014, Bernard Cazeneuve était l'invité de Jean-Michel Aphatie sur RTL
Jean-Michel Aphatie
Nos regards sont tournés ce matin vers l’Hérault et Montpellier victimes de spectaculaires inondations, la situation sur le terrain est-elle maîtrisée, Bernard Cazeneuve ?
Bernard Cazeneuve
Les pluies cette nuit ont été moins importantes qu’on ne le pensait mais nous maintenons la vigilance rouge toute la matinée, je me rendrai cet après-midi sur place à Montpellier pour rencontrer à la fois les forces de sécurité, les forces qui se sont mobilisées et qui relèvent de la Direction générale…
Jean-Michel Aphatie
Beaucoup de monde mobilisé, du coup ?
Bernard Cazeneuve
Bien entendu ! Beaucoup de monde mobilisé, plus de 1.500 gendarmes, pompiers, j’ai demandé à ce qu’il y ait des militaires de la sécurité civile qui viennent renforcer les effectifs dans le département de l’Hérault de manière à ce que nous soyons efficaces pour protéger les personnes - nous déclencherons d’ailleurs pour une soixantaine de communes le dispositif de catastrophe naturelle à l’occasion du conseil des ministres de mercredi prochain - nous sommes donc dans une vigilance totale et j’irai cet après-midi à la rencontre des élus, également à la rencontre des pompiers qui se sont mobilisés fortement toute la nuit et qui continuent à se mobiliser pour apporter secours aux personnes.
Jean-Michel Aphatie
Et pour l’instant ce n’est pas qu’une chance, c’est le travail des sauveteurs aussi sur le terrain, on ne déplore pas de victime ?
Bernard Cazeneuve
Les alertes météo, qui ont été données, ont permis d’anticiper. Donc nous avons souhaité, à la fois avec les autorités locales, moi-même en mobilisant des militaires de la sécurité civile, prévenir, prévenir ça veut dire donner des consignes à la population pour éviter les sorties inopportunes, pour assurer la protection des enfants qui étaient dans les écoles, pour donner des conseils de prudence qui ont été rigoureusement respectées et encore une fois - je le redis – c’est 1.500 personnes qui se sont mobilisées pour la sécurité des habitants ont fait près de 1.200 interventions depuis le début de ces intempéries.
Jean-Michel Aphatie
Vous prononcerez ce matin, Bernard Cazeneuve, le discours annuel sur la sécurité devant les cadres de votre ministère - l’actualité place toujours au premier rang des préoccupations bien entendu la lutte contre le terrorisme - comment définiriez-vous ce matin, Bernard Cazeneuve, la menace qui pèse sur la France ?
Bernard Cazeneuve
J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet ! La menace est réelle, elle est réelle et la vigilance est totale. Elle est réelle pourquoi ? Parce que nous avons près de 1.000 ressortissants Français qui sont engagés dans des opérations, soit qu’ils sont sur le théâtre des opérations – près de 365 Français sont combattants dans les groupes terroristes…
Jean-Michel Aphatie
C’est précis comme chiffre, 365 dites-vous ?
Bernard Cazeneuve
Oui ! Je donne des chiffres précis, parce que nous avons un travail très important qui est fait par la Direction Générale de la Sécurité Intérieure d’identification de ceux qui partent. Nous avons à peu près 100…
Jean-Michel Aphatie
Et ce chiffre n’augmente pas ?
Bernard Cazeneuve
Ce chiffre augmente de façon considérable ! Depuis le début de l’année 2014, nous avons une augmentation de 74 % du nombre de nos ressortissants qui, soit sont partis, soit sont sur le chemin du retour, soit sur le chemin de la Syrie, soit ont émis le souhait de partir sur le théâtre des opérations djihadistes, près de 200 ressortissants Français. Donc, face à la réalité de ce risque - nous avions auparavant des groupes terroristes fermés qui agissaient de façon ponctuelle sur le territoire nationale et ensuite repartaient, désormais nous sommes face à un terrorisme en libre accès, grâce notamment à l’activité de ces groupes sur internet - donc la vigilance est totale, ça nous a conduit d’ailleurs à mettre en place des dispositifs renforcés dans le cadre de Vigipirate et je rappellerai d’ailleurs ce matin aux gendarmes, aux policiers, aux responsables de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure la nécessité de cette mobilisation totale, à l’instar de ce que nous avons fait avec le Premier ministre à la Gare Montparnasse dimanche.
Jean-Michel Aphatie
Et la difficulté c’est de repérer ceux qui, étant en Syrie des combattants aguerris, violents, décidés sans doute à faire du mal, reviennent en France ?
Bernard Cazeneuve
Nous avons 3 choses à faire ! D’abord, empêcher les départs…
Jean-Michel Aphatie
Oui !
Bernard Cazeneuve
Parce que ceux qui partent et qui reviennent, reviennent après avoir fréquenté les exécutions, les décapitations, les crucifixions, ils ont perdu tous leurs repères, ils sont d’une extraordinaire violence et représentent une potentialité réelle de risque pour le pays à leur retour, donc empêcher les départs - sous le contrôle du juge – de manière à ce que cette précaution ne soit pas attentatoire aux libertés publiques ; Par ailleurs, nous devons faire en sorte que ceux qui reviennent soient immédiatement signalés, pris en compte, nous travaillons pour cela sous l’autorité des juges et cela implique – comme en témoignent les évènements de la semaine dernière - une coopération étroite avec un certain nombre de nos partenaires, notamment les Turcs…
Jean-Michel Aphatie
Oui ! Ca avait mal marché avec la Turquie, ça marchera mieux à l’avenir on l’espère ?
Bernard Cazeneuve
Eh bien c'est-à-dire que nous avons pris des dispositions…
Jean-Michel Aphatie
Hum ! Hum, pour éviter le…
Bernard Cazeneuve
Pour mieux coordonner...
Jean-Michel Aphatie
La reproduction…
Bernard Cazeneuve
La circulation de l’information dans tous leurs services et des nôtres ; et il faut démanteler les filières et démanteler les filières ça implique du travail entre les services de renseignement français et les autres services de renseignement de l‘Union européenne, ça implique la modernisation et le perfectionnement de notre dispositif d’identification de ces combattants lorsqu’ils reviennent, il y a 2 sujets sur lesquels je travaille : un signalement combattant étranger dans le système d’information Schengen qui permettrait leur identification plus rapide dans les aéroports et la mise en place d’un système d’identification des passagers à l’échelle de l’Union européenne pour pouvoir les identifier dans tous les aéroports de l’Union rapidement.
Jean-Michel Aphatie
Le Département d’Etat Américain a publié hier la liste de militants très dangereux du Daesh - ils en ont classé une dizaine – et, parmi ceux-ci, figurait un Français Salim Benghalem, originaire du Val de Marne, que les Américains présentent comme un tortionnaire et un assassin dans ce groupe-là. Vous avez déjà repéré cet homme, vous connaissiez son existence et sa présence en Syrie, Salim Benghalem originaire du Val de Marne ?
Bernard Cazeneuve
Oui !
Jean-Michel Aphatie
Oui ?
Bernard Cazeneuve
Oui ! Je n’en dirai pas plus. Parce que le travail des services de renseignement et notamment du nôtre, en liaison avec d’autres, dès lors qu’il s’agit de lutter contre le terrorisme et de prévenir un certain nombre d’actes et de neutraliser un certain nombre d’individus est efficace dès lors que ceux qui savent se taisent parfois.
Jean-Michel Aphatie
Et donc les Américains… Vous confirmez, en tout cas, la dangerosité de ce Français que les Américains ont signalé à l’attention du public hier ?
Bernard Cazeneuve
Je confirme qu’il est dangereux et je n’ai pas d’autre commentaire à faire.
Jean-Michel Aphatie
Les policiers ont donc, on le voit, beaucoup de tâches à accomplir. Bernard Cazeneuve demain entrera en vigueur la réforme Taubira, une réforme pénale qui prévoit l’installation de la contrainte pénale, on veut éviter la prison dans certains cas à des délinquants, les syndicats de policiers - donc la réforme entre en vigueur demain – se plaignent du travail considérable disent-ils que cette réforme entrainera pour eux, ils ont raison ?
Bernard Cazeneuve
Je comprends les préoccupations des policiers, d’ailleurs le texte qui sort de l’Assemblée nationale n’est pas le texte qui était rentré et qui correspondait d’ailleurs aux arbitrages qu’avaient rendus le Premier ministre et le président de la République, mais…
Jean-Michel Aphatie
Mais ils sont inquiets aujourd’hui ?
Bernard Cazeneuve
Oui ! Et je veille d’ailleurs, dans le cadre de l’élaboration des textes d’application de cette loi, à ce que le travail d’investigation très important fait par les policiers - qui aboutit à l’élucidation de beaucoup d’affaires –ne soit pas obéré par des procédures complexes, il y a un travail réglementaire à faire.
Jean-Michel Aphatie
Oui ! Mais il le sera de toutes les façons ?
Bernard Cazeneuve
Ca dépendra beaucoup de ce que nous ferons sur les textes d’application. J’étais en veille avant que le texte ne soit voté, j’étais en attention pendant qu’il était voté et je suis en très grande vigilance au moment où nous proposons de prendre les textes d’application, ce qui est normal.
Jean-Michel Aphatie
Voilà ! C’est aimablement dit et ça n’a pas du échapper à la ministre de la Justice.
Bernard Cazeneuve
Mais avec la ministre de la Justice nous travaillons très bien ensemble et c’est la raison…
Jean-Michel Aphatie
Le couple fonctionne toujours formidablement bien ! Oui.
Bernard Cazeneuve
Et c’est la raison pour laquelle je veille, avec elle, au bon équilibre des textes réglementaires d’application de la loi.
Jean-Michel Aphatie
Sénatoriales, une nouvelle défaite, c’est dur ?
Bernard Cazeneuve
Moins ample qu’on ne le pensait…
Jean-Michel Aphatie
Ah ! On se contente…
Bernard Cazeneuve
Mais c’est quand même une défaite effectivement...
Jean-Michel Aphatie
Oui.
Bernard Cazeneuve
Qui résulte du fait que les Elections Sénatoriales sont généralement de façon différée la transcription de ce qu’ont été le résultat des élections locales - et ils n’ont pas été bons - il faut le reconnaître.
Jean-Michel Aphatie
C’est la réplique et comme toutes les répliques ça secoue, on va le dire comme ça. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, était l’invité de RTL ce matin.
Yves Calvi
Menaces réelles, vigilance totale, vient de nous dire le ministre de l’Intérieur. Juste une question, monsieur le ministre, l’enquête sur l‘assassinat d’Hervé GOURDEL avance-t-elle ? Est-ce que vous avez des informations ?
Bernard Cazeneuve
Cette enquête avance, j’ai des informations et je n’ai pas à les communiquer. Parce que, si l’on veut que l’enquête se déroule dans de bonnes conditions, il faut la laisser aller à son terme, je rappelle que cette enquête n’est pas conduite en France et il faut respecter rigoureusement les procédures et respecter aussi la souveraineté du pays dans lequel cette enquête est conduite avec beaucoup d’efficacité.