Intervention de Bernard Cazeneuve sur France Bleu Frequenza Mora le 1er juillet 2014

1 juillet 2014

Intervenant
… (propos en Corse)… ce qui nous permet de reparler du débat sur la Corse qui s’est tenu hier soir au Sénat. Au Palais Bourbon, en plus des 7 sénateurs qui ont participé aux discussions, se trouvait Bernard CAZENEUVE, le ministre de l’Intérieur qui est ce matin notre invité, il est interrogé dans sa voiture par Patrick VINCIGUERRA.
Patrick VINCIGUERRA
Bernard CAZENEUVE, bonjour. Il y a un mois vous êtes venu en Corse, c’était début juin, l’heure était à la fermeture, est-ce qu’un mois après les choses ont évolué ?
Bernard CAZENEUVE
Eh bien d’abord l’heure n’a jamais été à la fermeture, il y a une volonté du gouvernement de trouver des solutions très concrètes aux problèmes auxquels la Corse est confrontée, qu’il s‘agisse de la question de la pression foncière et des conséquences que cela peut avoir pour l’accès au logement des Corses, qu’il s’agisse de la question du développement de la langue corse et du linguisme en Corse, qu’il s’agisse des arrêtés MIOT pour lesquels j’avais moi-même contribué à l’occasion du débat parlementaire à dégager, en lien avec les parlementaires de Corse, des solutions. Donc il n’y a pas de fermeture, il y a simplement une volonté du gouvernement de trouver des solutions qui en soient vraiment, qui ne soient pas des impasses qui puissent poser des problèmes de droit et qui, à la fin, conduisent les Corses et le gouvernement ensemble à constater que les chemins empruntés n’en étaient pas et n’aboutissaient à aucune solution. Donc, il n’y a pas de fermeture, il y a simplement une volonté de pragmatisme du gouvernement qui le conduit à chercher des solutions qui en soient vraiment.
Patrick VINCIGUERRA
Selon vous donc le statut de résident, la co-officialité, sont des impasses juridiques ?
Bernard CAZENEUVE
Je dis qu’il y a, sur le statut de résident, un risque juridique majeur d’incompatibilité avec les principes de la Constitution et que, si nous changions la Constitution, avec le droit européen… et les positions qui sont les nôtres sont étayés sur des analyses en droit très, très solides qui ont été d’ailleurs communiqués par le préfet aux élus de la Corse ; pour ce qui concerne la co-officialité de la langue corse, elle pose également des problèmes de droit, mais je vous dis il y a d’autres pistes que la co-officialité pour développer massivement la langue corse en Corse, ce qui est le souhait du gouvernement - le bilinguisme en Corse est possible et il est même souhaitable - et par conséquent le souhait du gouvernement ce n‘est pas de fermer les portes, c’est d’ouvrir des portes sur des solutions et d’éviter que nous nous trouvions à trop avoir attendu, en explorant des pistes aléatoires, que nous nous trouvions dans une situation d’impasse.
Patrick VINCIGUERRA
Est-ce qu’une révision constitutionnelle pour la Corse est possible à brève échéance ?
Bernard CAZENEUVE
Mais une révision constitutionnelle pour la Corse, mais aussi faudrait-il savoir pour quoi faire ? Nous sommes dans une réforme des territoires qui peut à un moment donné conduire à envisager des évolutions constitutionnelles, dès lors que nous en sommes dans une dynamique de confiance qui consiste à explorer des vraies solutions pour la Corse, aucune porte n’est fermée, aussi faut-il que ces portes encore une fois ouvrent vers des solutions et non sur des impasses.
Patrick VINCIGUERRA
Depuis votre dernière visite il y a quand même eu un  élément nouveau, il y a une nouvelle donne, le dépôt des armes de la part du FLNC Union des combattants. C’est important selon vous, c‘est un geste politique important ?
Bernard CAZENEUVE
C’est un geste politique dont on prend acte ! Tout ce qui va dans le sens du dialogue, du dialogue dans la démocratie et dans la République, tout ce qui va dans le sens de l’apaisement, est souhaitable. Moi j’ai à l’égard de la Corse une exigence et une seule dans ma responsabilité de ministre de l’Intérieur, c’est de dire la vérité, de le dire sincèrement, à partir d’analyses juridiques et politiques qui soient argumentées et qui permettent d’approfondir le dialogue avec la Corse. Il n’y a aucune volonté de ma part de faire fermer le dialogue, il n‘y a aucune volonté de ma part de mettre fin à la discussion, il n’y a aucune volonté de la part du gouvernement de dire que telle ou telle piste aurait vocation à ne jamais être explorée, il y a simplement – dès que des pistes sont ouvertes – le devoir du gouvernement de dire la vérité et ses analyses, parce que le dialogue c’est aussi cela.
Patrick VINCIGUERRA
Donc le dialogue se poursuit, il y aura des ouvertures - mais elles sont minces – donc, concernant le problème du foncier, vous pro…
Bernard CAZENEUVE
Mais il n’y a pas d’ouvertures minces, il y a de vraies ouvertures sur de vraies solutions. On ne peut pas dire que les ouvertures soient minces et que les portes soient étroites, les portes sont grandes ouvertes sur de vraies solutions et il y a une prudence à envoyer la Corse dans des impasses à partir de solutions qui juridiquement ne seraient pas étayées ou conduiraient la Corse à emprunter des chemins aléatoires, l’éloignant des vraies solutions dont elle a besoin immédiatement pour régler les problèmes auxquels elle est confrontée aujourd’hui.

Patrick VINCIGUERRA
Et ces solutions sont l’établissement foncier et le développement de l’apprentissage de la Corse ?
Bernard CAZENEUVE
Mais les solutions ont peut les bâtir ensemble si l’on veut être dans le dialogue politique et, si on veut être dans la recherche de solutions, il faut impérativement que nous soyons dans le dialogue, et ce n’est pas parce que le gouvernement exprime son analyse en droit concernant un certain nombre de pistes qui ont été évoquées qu’il est fermé à toute évolution et à toute autre solution pour régler les problèmes auxquels la Corse est confrontée, je le redis très clairement.
Patrick VINCIGUERRA
Selon vous, la seule solution pour aller vers un statut de résident ou de la co-officialité ce serait que la Corse sorte de la République ?

Bernard CAZENEUVE
Mais je n’ai jamais dit ça ! C’est votre question qui le dit, je ne dis pas cela, je suis convaincu qu’il y a des solutions nombreuses pour la Corse dans la République, que le souhait des Corses est de rester dans la République, que le souhait des Corses est de trouver des solutions qui soient conformes au droit parce que la République et le droit se conjuguent ensemble – et que le gouvernement est dans la  perspective qui consiste à trouver pour la Corse dans la République des solutions qui ne soient pas des impasses juridiques.
Patrick VINCIGUERRA
Bernard CAZENEUVE, merci.
Bernard CAZENEUVE
Merci.