Discours de Bernard Cazeneuve en hommage aux victimes de la fusillade du musée juif de Bruxelles, Bruxelles, 4 juin 2014

4 juin 2014

Madame la ministre,
Monsieur le Grand rabbin,
Monsieur le président,
Mesdames, Messieurs.


Le 24 mai, un homme entrait dans ce musée et abattait froidement quatre innocents, avec pour seul mobile la haine du peuple juif. Aucun mot ne sera jamais assez fort pour exprimer l’horreur qu’inspire cette violence, ni bien entendu pour atténuer le chagrin des proches des victimes. Comment dire, sans les trahir, l’émotion et la colère qui nous habitent ? Une fois encore, au cœur de l’Europe, des hommes et des femmes auront été frappés à mort parce qu’ils étaient juifs.

Le retour d’une telle abomination fait l’impression d’un cauchemar. Quand l’Europe libérée découvrit avec effroi les images des camps de la mort, nos pères s’élevèrent de toute la force de leur indignation pour que plus jamais ce crime contre l’homme, contre notre humanité, ne puisse être commis.  Et pourtant, 70 ans plus tard, alors que nous nous apprêtons à célébrer l’anniversaire du débarquement de Normandie et notre libération du joug de la barbarie nazie, des Juifs continuent de mourir sous les balles de ceux qui les haïssent. Nous ne pouvons le tolérer.

Je veux donc adresser aujourd’hui aux communautés juives de Belgique et de France frappées par le deuil, et que nos ennemis voudraient condamner à vivre dans la peur, un message de soutien fraternel, de solidarité et de compassion.

Aujourd’hui des lâches manipulent des faibles au nom d’un message religieux dévoyé pour leur faire commettre des actes criminels. Je veux dire à ces barbares qu’un homme qui en tue un autre en raison de son identité est un ennemi du genre humain. L’antisémitisme, comme le racisme, n’est pas un simple crime, il est une négation de l’humanité de sa victime. Un homme qui assassine des civils au hasard de sa haine ne sera jamais un combattant. Une doctrine qui prône l’assassinat aveugle inspirera toujours de l’horreur aux vrais croyants de toutes les confessions.  Aussi les plus hautes autorités religieuses – juives, musulmanes, chrétiennes – se sont-elles montrées unanimes, en France comme en Belgique,  pour dénoncer ce crime funeste et délivrer un message de paix et de concorde.

Français et Belges, nous nous retrouvons aujourd’hui côte à côte, unis par le chagrin comme par la volonté de lutter sans faiblesse contre les auteurs et les inspirateurs de tels crimes. Dans le drame qui s’est joué ici, à Bruxelles, le suspect que nous avons arrêté, comme l’une des victimes, étaient français. Cela nous oblige à reconnaître que la violence et la haine qui nous menacent ne s’arrêtent pas aux frontières. C’est ensemble que nous devons faire face.

Au nom de la République Française – et je sais que le Gouvernement belge partage cette résolution-, je tiens à vous assurer de notre fermeté absolue dans le combat que nous livrerons contre ces menaces. Aucun acte antisémite, les petites phrases mortifères pas plus que les grands gestes assassins, ne doit rester impuni. Leurs auteurs doivent savoir qu’ils seront inlassablement traqués, retrouvés et punis.