Le 26 août 2015, Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, était "l'Invité d'Inter" sur France Inter.
Patrick Cohen
Bonjour Bernard Cazeneuve.
Bernard Cazeneuve
Bonjour.
Patrick Cohen
Vous étiez à Amiens hier soir, dans la Somme, où un gendarme a perdu la vie dans l’exercice de son métier. Avez-vous compris ce qui s’est passé dans ce camp de nomades ?
Bernard Cazeneuve
Il y a une enquête en cours, le procureur de la République s’est exprimé hier soir, je me suis rendu sur place parce que, il y avait beaucoup de morts au terme de ce drame, une famille décimée, un petit bébé de 9 mois, un couple, un enfant de 3 ans blessé, et puis, deux policiers qui ont été blessés, dont l’un grièvement, et qui a trouvé la mort. Il semble que ce soit la violence ordinaire, inacceptable, abjecte, qui se soit emparée de cette aire des gens du voyage, après que l’un des résidents de cette aire de gens du voyage s’était alcoolisé, maintenant, l’enquête précisera les conditions dans lesquelles tout cela s’est produit. Mais j’ai vu hier soir une famille entière décimée, brisée, un jeune père qui avait perdu à la fois son père, sa compagne, son bébé, beaucoup d’émotion, de tension aussi, de colère. Et j’ai tenu à aller à Amiens, d’abord parce que, un gendarme, très valeureux, plein de bravoure, s’est interposé et a perdu la vie, il y avait une émotion considérable parmi les représentants des différentes brigades de gendarmerie de la Somme, et puis, il y avait ce drame familial. Et à ce moment-là, il faut être là auprès de ceux qui souffrent.
Patrick Cohen
L’attaque du THALYS, Bernard Cazeneuve, attaque ciblée et préméditée, a dit hier le procureur de la Paris, François MOLINS. A-t-elle été concertée ? Soupçonnez-vous des complicités ?
Bernard Cazeneuve
Là aussi, l’enquête dira les conditions dans lesquelles tout cela a été organisé. Ce que l’on peut dire en tous les cas, au regard des autres événements qui se sont produits en France et en Europe, c’est qu’il y a aujourd’hui une volonté de Daesh, à partir de la Syrie, mais pas seulement, de frapper la plupart des pays de l’Union européenne.
Patrick Cohen
Vous sous-entendez que cette attaque de THALYS a été commanditée ?
Bernard Cazeneuve
Non, je ne sous-entends rien, puisque je vous dis que c’est au procureur de la République en fonction des éléments de l’enquête de donner les éléments précis, dont il disposera quand les enquêtes auront été à leur terme. Ce que je dis simplement…
Patrick Cohen
Mais vous évoquez spontanément Daesh…
Bernard Cazeneuve
Non, mais ce que je dis simplement, c’est que la plupart ou même la quasi-totalité des attentats qui se sont produits ou des tentatives d’attentats que nous avons déjouées, parce que nous déjouons tous les jours des attentats, et pendant l’été, nos services ont beaucoup travaillé et démantelé des filières, nous constatons qu’il y a systématiquement un lien entre cette organisation, ce califat de la haine et du crime qu’est Daesh, et ceux qui, en Europe, commettent des crimes.
Patrick Cohen
C’est le cas pour Ayoub El-Khazzani ?
Bernard Cazeneuve
Je vous ai déjà dit qu’il y avait une enquête…
Patrick Cohen
L’enquête le dira…
Bernard Cazeneuve
Et que l’enquête le dira.
Patrick Cohen
Alors, Ayoub El-Khazzani faisait l’objet d’une…
Bernard Cazeneuve
Pardonnez-moi d’être un peu entêté, mais ce sont des sujets sur lesquels il faut être précis, je suis ministre de l’Intérieur, je ne peux pas raconter n’importe quoi, d’ailleurs, je constate que sur ces sujets, beaucoup de choses approximatives et aléatoires sont dites, moi, je ne peux pas me permettre cela, et lorsqu’il y a une enquête, c’est au procureur de la République, sur la base du travail de la police judiciaire, de communiquer les éléments dont il dispose.
Patrick Cohen
Alors, on va parler du travail de la police concernant le suspect, Ayoub El-Khazzani, qui a été mis en examen cette nuit, incarcéré, il faisait l’objet d’une fiche de renseignement, une fiche S, comme 5.000 autres personnes en France. Certains ont demandé leur arrestation ou leur expulsion. A quoi servent ces fiches S si la police n’intervient pas contre ces fichés, Bernard Cazeneuve ?
Bernard Cazeneuve
Là, c’est une question à laquelle je peux répondre, et je vais y répondre par conséquent très précisément…
Patrick Cohen
J’en suis ravi.
Bernard Cazeneuve
Ces fiches S sont des fiches de renseignement, ce ne sont pas des mandats d’arrêt international, ce sont des fiches de renseignement. Ce sont des outils dont disposent les services de police, pour procéder à la surveillance de ceux sur lesquels ne repose aucune incrimination pénale, mais qui peuvent, par leur activité, représenter à un moment ou à un autre un risque de trouble à l’ordre public ou une atteinte à la sûreté de l’Etat. Il y a donc ces fiches qui sont de véritables outils de renseignement, de suivi, et notamment de suivi pour établir la traçabilité du parcours de ceux qui peuvent se livrer à des activités criminelles. Premier point. Deuxième point, pour ce qui concerne le terroriste du THALYS, que s’est-il passé et qu’avons-nous fait ? Il s’agit d’un ressortissant marocain, étranger, qui réside en Espagne, il a fait l’objet d’un regroupement familial en Espagne. Les Espagnols nous signalent, au début de l’année 2014, sa possible présence en France, au titre d’une activité dans un groupe de téléphonie. A ce moment-là, que fait le service français, il émet une fiche S, pourquoi est-ce qu’il émet une fiche S, et je crois d’ailleurs que c’est le seul service à l’avoir fait, et il a fait son travail, pourquoi est-ce qu’il émet cette fiche ? Tout simplement parce que ces fiches permettent au système d’information Schengen, c’est-à-dire la totalité des pays qui sont dans le système Schengen, de pouvoir avoir accès à l’information sur le parcours de ce personnage, bon…
Patrick Cohen
Qui a effectivement séjourné en France, y a travaillé…
Bernard Cazeneuve
Qui a effectivement séjourné en France quelques mois…
Patrick Cohen
Sans avoir été repéré par vos services de renseignements…
Bernard Cazeneuve
Non, les services de renseignements à ce moment-là ont le signalement d’un individu qui fréquente une mosquée salafiste, donc ils procèdent à un minimum d’investigations nécessaires, ils émettent cette fiche S, rien, à ce moment-là, ne signale une activité à caractère criminel en France, et d’après les premiers éléments qui ont été communiqués par le procureur hier, donc je peux en parler, il y a confirmation qu’il ne s’est pas livré en France à une activité criminelle, mais pour autant, les services français, alors qu’il a quitté le territoire national où il ne reste que quelques semaines, continuent à communiquer à d’autres services des éléments concernant le parcours de ce terroriste. Et par exemple, alors qu’il réside essentiellement en Belgique, en Allemagne, à Cologne, et à côté de Bruxelles, lorsque, il emprunte un avion en mai 2015, entre Istanbul et Berlin, que la fiche sonne, on communique immédiatement ces informations aux autres services. Donc, soyons très clairs, parce que j’ai entendu beaucoup de choses absolument absurdes sur ce sujet, la fiche S n’est pas un mandat d’arrêt, on n’arrête pas les gens sur la base d’une fiche S, c’est un dispositif qui permet de suivre le comportement de gens qui n’ont commis aucune infraction pénale, mais qui peuvent en commettre une. Premier point. Deuxièmement, il s’agit d’un étranger, qui a résidé à l’étranger, et malgré cela, le fait que nous ayons été le seul service de renseignements à émettre une fiche S a permis d’établir la traçabilité de son parcours. Et par conséquent, lorsque certains, dans l’emportement, la recherche de la polémique, le goût de l’outrance, demandent les raisons pour lesquelles les services français n’ont pas procédé à l’arrestation de cet individu, il était essentiellement, la quasi-totalité du temps, à l’étranger, il est à l’étranger, et j’espère que chacun a bien à l’esprit – un petit effort de raisonnement permet d’atteindre cette réalité – que les services intérieurs français de sécurité n’ont pas vocation à arrêter à l’étranger des ressortissants étrangers. Premier point…
Patrick Cohen
Non, mais il était pendant deux mois au moins en France en Seine-Saint-Denis…
Bernard Cazeneuve
Oui, mais pendant les deux mois en France…
Patrick Cohen
Et à Aubervilliers.
Bernard Cazeneuve
Oui, mais pendant les deux mois pendant lesquels il a été en France, alors qu’il a été signalé, et il faisait l’objet d’un suivi particulier des services espagnols depuis des années, il n’a pas commis d’infractions pénales. Deuxième élément sur lequel je veux apporter une réponse précise, j’ai vu que certains proposaient que tous ceux qui ont une fiche S soient expulsés dès lors qu’ils sont étrangers, bon. Nous sommes dans un État de droit, nous sommes dans la…
Patrick Cohen
Ce qu’a dit le Front national, et Marine Le Pen…
Bernard Cazeneuve
Nous sommes en République, et par conséquent, il y a des règles de droit auxquelles on peut ou pas être attaché, mais pour ce qui concerne le gouvernement français, il est attaché à ces principes et à ces règles, parce qu’elles sont celles de la République et celles de l’État de droit. Que disent ces règles ? Ces règles disent que l’on ne peut procéder à l’expulsion d’un étranger résidant en France que dès lors qu’il y a suffisamment d’éléments témoignant, soit d’une infraction pénale, soit de la volonté de commettre un crime qui peut justifier de… et là, je veux donner aussi des éléments précis, il y a, pour ce qui concerne ceux qui sont combattants étrangers, c’est-à-dire qui sont partis sur le théâtre des opérations, et qui sont revenus, 800, à peu près 840 fiches S qui ont été émises. Sur ces 840 fiches S, il y en a à peu près, pas à peu près, exactement 140 qui concernent des combattants étrangers, qui ont pu résider en France ou qui y résident encore. Eh bien, je veux simplement donner un chiffre, j’ai proposé 49 mesures d’expulsion depuis le début de l’année 2015 sur la base de dossiers très étayés d’étrangers étant en lien avec des entreprises terroristes, et la doctrine du gouvernement est très simple, et elle s’applique de façon extrêmement ferme : lorsqu’il y a des individus étrangers résidant en France qui sont de près ou de loin en lien avec une entreprise terroriste, et que les dossiers les concernant sont suffisamment étayés pour que, dans le respect du droit, il soit procédé à leur expulsion, le gouvernement le fait sans état d’âme. Et ces sujets, je termine par cela, Monsieur Cohen, impliquent de la rigueur, de la fermeté, et autre chose que des amalgames, des approximations, et, je le dis sans polémique, des bobards.
Patrick Cohen
Il y a forcément d’autres individus dangereux en liberté, d’autres projets d’attaques. Les passagers du THALYS ont eu beaucoup de chance, parce que certains ont eu du courage. Qu’est-ce qu’on peut faire de plus, Bernard Cazeneuve ? Est-ce qu’il faut, à l’avenir, s’en remettre au hasard et au courage pour échapper à d’éventuels carnages terroristes ?
Bernard Cazeneuve
Mais ce n’est pas ce que nous faisons, là aussi, il faut dire les choses extrêmement précises et ne pas entretenir dans ce pays un climat qui serait celui de l’impuissance de ceux qui sont en charge de la sécurité des citoyens européens face au risque terroriste. Parce que ce n’est pas le cas. Je le redis, il y a aujourd’hui 150 procédures judiciaires concernant près de 800 personnes, qui ont été ouvertes à l’égard d’individus qui représentent un risque au regard de leur lien avec des filières terroristes pour la sécurité des Français. Il y a près de 200 personnes qui, au terme de leur judiciarisation, ont été mises hors d’état de nuire en étant emprisonnées ou placées sous un contrôle judiciaire extrêmement sévère. Et par ailleurs, nous avons multiplié les dispositifs pour assurer la sécurité des Français dans un contexte de risque inédit, nous n’avons cessé de le dire…
Patrick Cohen
Sur les trains, vous n’irez pas plus loin, Bernard Cazeneuve ?
Bernard Cazeneuve
Non, attendez, je rappelle quand même que nous avons pris une loi de lutte contre le terrorisme avec l’interdiction de sortie du territoire pour ceux qui veulent se livrer à des crimes et qui reviendraient en étant plus dangereux encore, nous avons mis en place l’interdiction du territoire pour les étrangers qui ont commis des crimes et qui veulent revenir en France, ils ne peuvent plus revenir. Nous avons mis en place le blocage administratif des sites Internet pour ceux qui fréquentent des sites Internet et se radicalisent par la fréquentation d’Internet, parce que 90 % de ceux qui basculent dans le terrorisme basculent par Internet…
Patrick Cohen
Donc il n’y a rien à faire de plus…
Bernard Cazeneuve
Non, attendez, nous avons mis en place une loi sur le renseignement, parce que quand on regarde tous les cas dont on parle, là, qu’est-ce qu’on constate ? C’est fondamental de comprendre ça, on constate que beaucoup de ceux qui préparent des actes terroristes en France ou en Europe le font en utilisant des moyens cryptés sur Internet. Nous avons mis en place une loi sur le renseignement qui permet d’entrer dans ces messages, pour prévenir les actes terroristes et procéder à l’arrestation de ceux qui veulent les commettre avant qu’ils ne les commettent. Cette loi n’est pas encore en vigueur, parce que les décrets d’application sont pris actuellement, et cette loi, elle sera en application dans quelques semaines. Nous avons aussi le dossier du PNR européen, je prends l’exemple du THALYS, le PNR européen, c’est quoi ? C’est un dispositif qui permet, lorsqu’on réserve des billets de train ou d’avion, de pouvoir en amont savoir quel sera trajet de ceux qui sont signalés, par conséquent, de pouvoir éviter de les voir prendre des moyens de transport qui peuvent représenter un risque. Tout cela, nous l’avons fait. Et je vous fais une dernière remarque, Patrick Cohen, lorsque nous avons pris ces mesures, quelles sont les formations politiques que nous avons eues contre nous systématiquement, le Front national, contre le PNR, contre la loi Renseignement, contre le blocage administratif des sites. Pourquoi ? Pour deux raisons très simples, c’est que lorsqu’il s’agit d’apporter une réponse à la lutte contre le terrorisme, le Front national ne cherche pas les solutions, il cherche les problèmes, parce que c’est sur les problèmes qu’il prospère, et puis, deuxièmement, le Front national ne cherche qu’une chose contre le terrorisme, c’est de pointer la communauté musulmane pour créer des tensions qui permettent à cette organisation politique de faire prospérer son discours funeste.
Patrick Cohen
Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, on vous retrouve dans quelques minutes avec des réponses aux auditeurs de France Inter, sûrement sur les contrôles, d’éventuels contrôles à l’entrée des trains, et puis, on reviendra aussi sur la question des migrants, la crise des migrants.
Patrick Cohen
Au 01.45.24.7000, avec en ligne au standard d’Inter Didier qui nous appelle de Marseille, bonjour Didier.
Didier
Bonjour Monsieur Cohen, et bonjour au ministre de l’Intérieur.
Bernard Cazeneuve
Bonjour.
Didier
Je suis un peu ému, mais je vais quand même témoigner. Moi je prends le train depuis plus de 3 ans et j’ai pu observer des situations, à mon sens assez dramatiques, où quelquefois les trains, notamment les TER, sont vides, dans le sens où on n’a aucun contrôleur. Certains restent dans leur cabine de peur de se faire agresser verbalement par certains individus, et ça c’est la réalité régulière, notamment en région PACA, et je ne pense pas que ce soit une faute du ministre de l’Intérieur, mais je pense plutôt au président de la SNCF. Certains contrôleurs, à mon sens, sont complètement abandonnés. J’ai vu des situations où certains contrôleurs se faisaient agresser verbalement, et moi, en tant que citoyen français, c’est des choses qui me révoltent intérieurement. Je trouve qu’on ne pose pas assez de limites dans notre pays face à certains individus et je crois qu’on court après ces gens, et eux ne courent plus. En fait j’ai l’impression qu’on n’a pas un temps d’avance, j’ai l’impression que c’est plutôt ces personnes-là, ces individus, qui ont un temps d’avance sur nous, et ça m’inquiète.
Patrick Cohen
Le ministre va vous répondre.
Didier
J’avais juste une question pour finir. Quelles sont les solutions aujourd’hui ? moi hier soir je suis passé en gare de Marseille, parce que je suis vigilant, aujourd’hui je suis inquiet, je ne vous cache pas que j’ai des peurs, malgré tout, et donc on est vigilant, on n’est pas les seuls, on observe les situations, hier en gare de Marseille – alors j’espère qu’il y avait des gens en civil, et tant mieux – mais en tout cas, aucune force de l’ordre quand je suis arrivé en gare de Marseille, et c’est quelque chose qui m’a surpris, parce que je me suis dit…
Patrick Cohen
On vous a perdu Didier, le ministre de l’Intérieur va vous répondre. Bernard Cazeneuve, vous entendez cette inquiétude.
Bernard Cazeneuve
La question de la sécurité dans les transports ça renvoie au risque terroriste et ça renvoie aussi à la sécurité quotidienne des Français dans les transports en commun. Pour ce qui concerne le risque terroriste d’abord, il y a 30.000 policiers, gendarmes, militaires, qui sont aujourd’hui, dans le cadre du plan Vigipirate, déployés sur la plupart des infrastructures à risques, et notamment les infrastructures de transport et les gares. Est-ce que l’on peut, après les événements du Thalys, compléter les dispositions de Vigipirate pour être encore plus performant ? C’est l’objet qui aura lieu samedi à Paris, entre les ministres des Transports et de l’Intérieur de l’Union européenne, pour regarder des propositions très concrètes. D’abord, est-ce que l’on peut mettre en place des contrôles, j’y tiens beaucoup, coordonnés et simultanés, dans les pays de l’Union européenne, qui permettent de faire sonner les fameuses fiches S et de procéder à des contrôles qui permettent de mieux identifier ceux qui prennent les transports en commun.
Patrick Cohen
Au départ des trains internationaux, c’est bien cela ?
Bernard Cazeneuve
Il faut regarder si l’on peut mettre en place un dispositif qui permette de contrôler, dans les aéroports, dans les moyens de transport, plus systématiquement, de façon plus coordonnée, ceux qui empruntent ces moyens de transport. Schengen a un extraordinaire avantage c’est que, par le système d’information Schengen on peut établir la traçabilité de ceux qui voyagent, aussi faut-il faire sonner ces fameuses fiches S, dans les aéroports, dans les gares. On peut le faire sans modifier Schengen, puisqu’il s’agirait de contrôles coordonnés et simultanés, pas de contrôles obligatoires, et ça c’est une proposition française, qui date d’il y a 6 mois, je souhaite qu’on la mette en œuvre et ce sera l’un des sujets importants de la réunion de samedi.
Patrick Cohen
Bernard Cazeneuve, c’est Schengen qui fait qu’il n’y a pas de contrôle à l’entrée du Thalys comme il y en a, par exemple, à l’entrée de l’Eurostar ? Chacun peut le constater à la gare du Nord à Paris.
Bernard Cazeneuve
Schengen n’empêche pas ces contrôles.
Patrick Cohen
Elle n’empêche pas, mais elle les dispense.
Bernard Cazeneuve
Non, Schengen, soyons précis, Schengen interdit les contrôles obligatoires, mais Schengen n’interdit pas des contrôles simultanés, et coordonnés, et la proposition française – parce que si on modifie le Code Schengen il y en a pour très longtemps, moi je cherche des solutions immédiates et efficaces – Schengen, par le système d’information Schengen, permet à tous les pays de l’Union européenne de suivre le parcours de ceux qui représentent un risque terroriste, il faut faire sonner les fiches S, et pour ça il faut des contrôles coordonnés et simultanés dans la plupart des pays de l’Union européenne concernés par ces parcours. Deuxièmement, il faut aussi renforcer la sécurité dans les gares, les contrôles dans les gares. Est-ce que l’on décide, par exemple, de rendre les papiers obligatoires ? Est-ce qu’on autorise la SUGE et les services de police à faire des fouilles aléatoires de bagages ? Ce qui ne signifie pas du tout des contrôles discriminants, ces contrôles aléatoires ça existe, ça se fait dans le cadre des règles déontologiques qui régissent le fonctionnement des services de police. Est-ce que l’on met en place des équipes de police multinationales dans les trains ? ce sont ces sujets qui sont à l’examen de la réunion de samedi, qui doivent faire l’objet d’expertises techniques parce qu’on ne peut pas envoyer des propositions à la volée sans avoir un minimum d’expertise, de travail en commun, parce que si nous prenons des dispositions en France qui ne sont pas prises dans d’autres pays, comme ces trains traversent les frontières, ça n’a pas de sens et pas d’intérêt. Donc, la réunion de samedi sera une réunion qui conduira les ministres de l’Union européenne concernés à faire ces propositions. Ça c’est pour le volet terrorisme. Nous avons fait des choses, elles peuvent être complétées, ça implique une démarche européenne, c’est le sens de l’initiative que j’ai prise, de cette réunion de samedi à Paris. Pour ce qui concerne la sécurité dans les transports en commun, nous avons relancé le travail avec les grandes sociétés de transport pour qu’il y ait plus de présence, à la fois des dispositifs de contrôle de ces entreprises, de la police, dans les trains, ça a fait l’objet d’une convention, signée avec ces entreprises, et ça fait l’objet d’une réflexion avec le Parlement, notamment le député Savary, qui va proposer, en accord avec le gouvernement, des dispositions législatives pour renforcer l’efficacité des contrôles, pour plus de sécurité dans les moyens de transport.
Patrick Cohen
Alors, il y a beaucoup de questions, mais il y a aussi des questions pour vous Bernard Cazeneuve, ce matin, sur la crise des migrants, qui est un dossier dont vous avez la charge, et c’est Martine qui nous appelle du Maine-et-Loire.
Martine
Merci Monsieur Cohen pour l’opiniâtreté de vos questions, auxquelles vous n’avez guère de réponse. Je vous respecte beaucoup Monsieur le ministre, comme je respecte n’importe quel être humain, mais je n’ai pas de question à vous poser parce que, vraiment, on n’y croit plus. Moi je voulais parler de tous ceux qui arrivent contraints soit par la misère, soit par la guerre, dans nos pays, on aurait fait la même chose à leur place, et on qu’on n’accueille absolument pas, mais absolument pas. Alors, vive la gauche de Jaurès, où est-elle cette gauche-là ? Evidemment, je n’étais pas née, mais enfin, pour parapher Monsieur Brel, pourquoi ont-il Jaurès ? Parce que, franchement messieurs, que vous soyez de gauche ou de droite, en politique, on n’a plus envie de voter pour vous. C’est une française, c’est une européenne convaincue, et une femme de gauche qui vous dit ça, une colère froide. On ne vote plus pour quelque chose, on vote contre, le pire, et le pire c’est vous qui êtes en train de lui faire un boulevard, pas vous tout seul, le Front national, pour ne pas le nommer. Voilà. Je n’ai pas de question Monsieur le ministre.
Patrick Cohen
Mais c’est bien sur les migrants que vous vouliez interpeller notre invité ce matin et sur le fait…
Martine
Mais oui, parce que notre politique est lamentable. Vous pouvez toujours vous déplacer à Calais… quand on a colonisé, nous, la terre entière, on n’a pas beaucoup d’état d’âme par rapport à ça, on est allé chercher de la chair à canon au Maghreb et en Afrique, en disant, l’État-major disait « mettre en première ligne, il ne passera pas l’hiver », et ça c’est véridique, et voilà. J’ai honte. Je n’ai pas de question.
Patrick Cohen
Pas de question, mais j’espère que vous allez rester à l’écoute pour entendre la réponse de Bernard Cazeneuve.
Bernard Cazeneuve
Vous n’avez pas de question, mais moi j’ai une réponse, et elle va être aussi directe que l’expression qui a été la vôtre. Quand on se réfère à la gauche de Jaurès, quand on se réfère à la gauche de Zola, on a une certaine rigueur et exigence quant aux faits. Alors, vous ne savez pas ce que nous faisons, vous condamnez ce que nous faisons sans savoir, je vais vous dire ce que nous faisons, et je vais vous le dire nettement. Lorsque je suis arrivé, avec ce gouvernement, en responsabilités, il fallait 24 mois pour obtenir l’asile en France, j’ai multiplié les moyens des administrations qui assurent l’accueil des demandeurs d’asile en France. Nous avons créé 8000 places en 2 ans et nous venons d’en rajouter 4000, 12.000 pour assurer l’accueil des demandeurs d’asile dans des conditions dignes. Nous avons accueilli près de 5700 syriens, je ne parle que des syriens, au cours des dernières années. Avec la France et l’Allemagne, ensemble, alors qu’il y a ce drame humain, nous avons poussé l’Europe à mettre en place une politique de l’asile qui permette à l’Europe d’être à la hauteur de l’enjeu, la France va accueillir 8000 réfugiés persécutés de plus. Lorsque nous allons à Calais, nous y allons pour quoi ? Pour mettre en place un accueil de jour, c'est-à-dire un repas par jour, des conditions d’accueil pour les femmes et les enfants vulnérables, qui n’existaient pas. Je serai, avec le Premier ministre et les commissaires européens, à Calais, lundi de nouveau, pour quoi ? Pour que l’Union européenne nous aide à aménager humainement ce que l’on appelle « la lande », où sont ces réfugiés qui viennent de Syrie, d’Irak, et qui souffrent, et ça c’est un combat, et ce combat nous le menons, et nous le menons avec sincérité, nous le menons avec franchise. Et quand on est de gauche et qu’on a une certaine exigence en termes de valeurs, et une certaine exigence au regard des préoccupations, que je comprends très bien, exprimées par notre auditrice, il faut savoir ce qui est fait, il faut aller dans le détail des choses, parce que la volonté, dans l’action, elle suppose aussi de la précision, de la détermination, et de l’ardeur pour faire en sorte que les difficultés soient surmontées.
Patrick Cohen
Ça c’est ce que fait la France, mais il y a la question de l’Europe qui, chacun en convient, n’est pas à la hauteur, Bernard Cazeneuve.
Bernard Cazeneuve
Bien entendu, et c’est la raison pour laquelle la France a été constamment à l’initiative. Là aussi, quand j’entends un certain nombre de commentateurs, notamment de l’opposition, dire « la France n’est pas assez en avant-garde, la France ne prend pas assez d’initiatives », mais avant même que la crise migratoire n’advienne, le 30 août 2014 précisément, il y a 1 an, j’ai fait une tournée de toutes les capitales européennes pour convaincre l’Europe de mettre en place une politique européenne de l’asile, pour faire en sorte que, lorsque les frontières extérieures de l’Union européenne sont franchies, on puisse immédiatement réserver un accueil à ceux qui relèvent du statut de réfugiés, et à engager une politique de codéveloppement avec les pays de provenance. Voilà tout ce que nous faisons en nous battant. Et moi j’aimerais bien que dans un contexte extraordinairement difficile, où nous avons des sujets très lourds à traiter, et qui impliquent énormément d’énergie et de conviction, il y ait parmi ceux qui regardent et qui apprécient, qui sont bien légitimes à exprimer des vis et des opinions, simplement un peu d’honnêteté dans le regard porté sur la France.
Patrick Cohen
L’Allemagne a annoncé hier officiellement qu’elle renonçait à renvoyer les réfugiés syriens vers leur pays d’entrée de l’Union européenne, c’est le premier pays à le faire de cette façon-là, c’est un exemple, Bernard Cazeneuve ?
Bernard Cazeneuve
Mais nous travaillons avec les Allemands en permanence sur ces sujets, et nous le faisons nous-mêmes, c’est-à-dire que lorsqu’il s’agit de réfugiés qui viennent de Syrie, de pays dans lesquels ils sont martyrisés, torturés, nous organisons l’accueil…
Patrick Cohen
En France ?
Bernard Cazeneuve
Mais, bien entendu, nous le faisons, et nous le faisons en étroite liaison avec Laurent Fabius, qui a pris de multiples initiatives hautement opportunes, notamment sur l’accueil des minorités persécutées de Syrie, je pense notamment aux chrétiens d’Orient. Il réunit une conférence internationale à Paris le 8 septembre. Nous agissons ensemble pour faire en sorte qu’en France, le meilleur accueil soit réservé. Nous avons réformé l’asile, nous sommes en train de voter une loi sur le séjour des étrangers où nous créons les conditions d’un accueil de ceux qui doivent l’être, ce qui implique aussi de la fermeté à l’égard des filières de passeurs qui doivent être démantelées, des acteurs de l’immigration irrégulière. Et c’est tout cela que nous faisons dans un contexte migratoire extraordinairement difficile, avec de la volonté, de la responsabilité et une exigence de rigueur intellectuelle, dont je regrette, dans le contexte, sur le terrorisme, et sur la question migratoire, qu’elle ne soit pas davantage partagée par ceux qui ont une parole publique dans notre pays.
Patrick Cohen
Voilà votre réponse, Bernard Cazeneuve, à l’auditrice Martine. On la rappellera tout à l’heure pour savoir si elle a été convaincue. Ce n’est pas fini pour vous, vous aurez dans trente secondes la dernière question d’Augustin Trapenard, et puis, évidemment, « Le billet de Nicole Ferroni ».
Patrick Cohen
Bonjour Augustin Trapenard.
Augustin Trapenard
Salut Patrick !
Patrick Cohen
Vous avez une question pour notre invité.
Augustin Trapenard
Oui, bonjour Bernard Cazeneuve. Vous êtes ministre de l’Intérieur. Et je remarque ironiquement…
Bernard Cazeneuve
Pour l’instant, vous êtes bien informé.
Augustin Trapenard
Que contrairement à pas mal d’hommes ou de femmes politiques, on vous connaît vraiment de l’extérieur, on ne vous connaît pas très bien intérieurement. Du coup, j’ai envie de vous poser une question plus intime pour qu’on apprenne à vous connaître différemment, et quoi de plus intime que la littérature, vous venez juste d’invoquer Emile Zola, quel est le livre de votre vie, Bernard Cazeneuve ? Celui qui vous a le plus dicté de choses, celui qui vous a le plus appris ?
Bernard Cazeneuve
C’est « La recherche » de Proust.
Augustin Trapenard
Et qu’est-ce que ça vous dicte « La recherche » de Proust ?
Bernard Cazeneuve
Plein de choses, d’abord, beaucoup d’informations passionnantes et détaillées sur la complexité de la psychologie des êtres, et la "futalité" du monde, et aussi beaucoup de choses sur la beauté des textes, la complexité de la syntaxe, la justesse des mots. Ce qui, pour moi, en littérature, est essentiel.
Augustin Trapenard
Et en politique ?
Bernard Cazeneuve
Eh bien, je ne sais pas, j’espérais vous avoir convaincu que ça l’était tout autant. Mais comme quoi, il y a toujours du travail en politique.
Patrick Cohen
Augustin Trapenard dans « Boomerang » tout à l’heure, 09h10.
Augustin Trapenard
Je reçois un écrivain justement, Alain Mabanckou, vous le connaissez, l’auteur de « Black Bazar », de « Mémoires de porc-épic », qui ne sort jamais sans sa gouaille et sans casquette. Son dernier roman s’appelle « Petit Piment », et c’est l’aventure truculente d’un orphelin dans le Congo de la révolution, Mabanckou pimente la rentrée dans « Boomerang » évidemment !
Patrick Cohen
A tout à l’heure. Nicole Ferroni.
Nicole Ferroni
Oui ?
Patrick Cohen
On me dit que vous êtes contente ?
Nicole Ferroni
Oui. Ecoutez, je suis très contente de recevoir monsieur Cazeneuve, car c’est quand même le ministre de l’Intérieur, et, voilà quand on a un ministre à France Inter, il y a une chose qui est sympa, c’est qu’il y a plus de viennoiseries dans la salle d’attente, après c’est vrai que comme vous n’êtes pas notre ministre de tutelle, on n’a pas le droit au maximum, mais j’ai un…
Bernard Cazeneuve
C’est pour ça qu’on ne m’a pas proposé les viennoiseries d’ailleurs.
Nicole Ferroni
Voilà, oh, mais je vous les donnerai après ! Mais j’ai un ami policier à Marseille qui me disait que par contre, quand vous allez visiter l’hôtel de police, alors là, c’est Byzance ! C’est-à-dire que, ils sortent des pots de fleurs dans la cour, ils font descendre tout le monde pour avoir des beaux effectifs à vous présenter. Et Philippe me disait, enfin, en fait, il ne s’appelle pas Philippe, mais comme il ne veut pas retourner à la circulation, j’évite de donner son prénom, il me disait : mais est-ce que tu penses qu’il le sait que pendant ce temps, nous, quand on doit faire des photos sur les scènes de crime, on est obligé d’utiliser nos téléphones portables, parce que dans notre service, on n’a même pas de quoi se payer un appareil photo ? Mais moi, je l’ai rassuré, je lui ai dit : tu sais, Philippe, ne sois pas triste, parce que quand bien même, on lui montrerait la réalité des choses, il n’aurait pas le temps de s’en occuper, puisqu’il doit écrire des discours, c’est vrai que, un ministre de l’Intérieur, ça écrit beaucoup de discours, je vois hier la fusillade au camp de Roms, un discours, l’attaque terroriste du THALYS, un discours, la crise migratoire, un discours, vous passez beaucoup de temps à écrire des discours. Et moi, qui écris des chroniques, je sais combien trouver la bonne formule, les mots qui marquent les esprits, ça prend la tête. Ce que vous faites d’ailleurs très bien, marquer les esprits. Enfin, en tout cas, le mien. Moi, j’ai été très marquée dans mon esprit par certaines de vos interventions. Pour vous dire, voilà, la dernière fois, donc j’étais en vacances en Italie avec ma sœur, et au retour, on est passées par la petite route côtière, et arrivées à Vintimille, alors qu’on passait dans le tunnel, il y avait un homme noir en train de marcher dans la pénombre, à côté des voitures, et là, j’ai eu cette phrase, j’ai fait : ah, un migrant ! Et je vous assure, ça m’a auto-choquée, j’ai dit : mais pourquoi je dis un migrant ? Je dis : oh, un migrant, comme j’aurais pu dire : oh, un panda. Même si, je vous l’accorde, il y a beaucoup moins de pandas que ce qu’il y a de migrants à la frontière italienne. Mais je me disais : mais pourquoi je dis un migrant alors que c’est un homme perdu, SDF, un exilé, un réfugié, surtout que je regardais bien, ça ne pouvait pas être un migrant, puisque, par définition, un migrant, ça migre, c’est-à-dire que ça se déplace d’un pays à un autre, or, si ma sœur et moi, on a pu passer la frontière, eh bien, les migrants, eux, n’ont pas eu le droit. Eux, on les empêche, on leur interdit l’accès. Donc on devrait peut-être plutôt les appeler les empêchés, les interdits ou même, je me disais, les calés, c’est-à-dire des gens dont on fait caler le moteur dans leur course de survie ; d’ailleurs, c’est peut-être pour ça que cette ville du Nord, elle s’appelle Calais, dans le sens : t’as fui la guerre, t’as perdu père et mère, t’as traversé les frontières, et puis, arrivé à Calais, t’as calé ! Et moi, je regardais comment, voilà, une fois arrivé sur le sol français, on considérait ces gens, et je pensais à ma grand-mère alsacienne, et je me disais : mais pourquoi on n’arrive pas à faire avec ces gens ce que l’Alsace et la Lorraine font très bien depuis des siècles, avec, vous savez, ces populations nigérianes, tchadiennes, qu’elles accueillent depuis des années avec le plus grand respect. Alors, ok, bon, les migrants africains accueillis par l’Alsace sont des cigognes, ce sont des grands oiseaux au bec rouge qui nichent sur des cheminées, mais pourquoi on ne peut pas faire avec des humains ce qu’on fait avec ces oiseaux ? Alors, on va me dire : mais ça n’a rien à voir Nicole ! Les cigognes se débrouillent toutes seules, elles se nourrissent toutes seules, alors qu’accueillir des gens, ça a un coût, la migration, ça a un coût. Et la France n’a pas vocation à accueillir toute la misère du monde. Alors, c’est vrai, peut-être qu’elle n’a pas vocation à accueillir toute la misère du monde, mais est-ce qu’elle a plus vocation à accueillir l’évasion fiscale, les abus de pouvoir, les passe-droits ? Finalement, qu’est-ce qui coûte le plus cher à la France, un migrant soudanais ou un Jérôme Cahuzac, un réfugié syrien ou un sénateur qui touche 11.000 euros d’indemnités, dont la moitié n’est pas soumise à l’impôt. Alors, je me disais que peut-être que de la cigogne africaine ou du pingouin en col blanc, le vautour n’est peut-être pas celui qu’on croit !
Patrick Cohen
Nicole Ferroni.
Nicole Ferroni
Voilà.
Patrick Cohen
Je vous laisse le dernier mot Bernard Cazeneuve ?
Bernard Cazeneuve
Ce sont des sujets sur lesquels on peut bien entendu faire de l’humour, il n’y a pas de sujets sur lesquels l’humour soit interdit, mais ce sont des sujets graves, et ce sont des sujets compliqués…
Nicole Ferroni
Les cigognes…
Bernard Cazeneuve
Vous parliez par exemple de Calais, je vais vous poser une question sur Calais, à Calais, il y a des filières de l’immigration irrégulière, il y a des gens qui exploitent la misère des êtres humains, après avoir prélevé 5.000 euros sur des migrants, on les exploite, on leur promet un passage en Angleterre, impossible. Qu’est-ce qu’on fait par rapport à ces structures ? On tient des discours sympathiques ou on agit ? Lorsqu’il y a des migrants à accueillir et qu’il y a un dispositif sur l’asile qui n’est pas approprié, on le modifie pour accueillir dignement les gens ou on fait des commentaires ?
Nicole Ferroni
Eh bien, je pense que c’est comme le trafic des espèces protégées, on agit…
Bernard Cazeneuve
Oui, voilà, eh bien voilà, et donc c’est ce que je fais. Et je le fais avec beaucoup de détermination et une préoccupation, je le dis là aussi très clairement, qui est une préoccupation d’humanité.
Patrick Cohen
Merci.