Intervention de Bernard Cazeneuve suite à la décision du tribunal administratif de Lille confirmant la mise à l'abri de migrants par l’État à Calais, au ministère de l'Intérieur le 25 février 2016
- Seul le prononcé fait foi -
Mesdames, Messieurs, le Tribunal administratif de Lille a rendu cet après-midi sa décision concernant le recours introduit par un certain nombre d’acteurs associatifs contre la décision de l’Etat de procéder à la mise à l’abri des migrants qui avaient trouvé refuge dans la zone sud de la lande de Calais. Cette décision conforte en tous points la stratégie arrêtée par l’Etat à Calais.
Je veux rappeler, à l’occasion du rendu de cette décision importante, extrêmement précise dans ses considérants, les différentes actions à caractère humanitaire, engagées depuis des mois par l’Etat à Calais.
Nous avons d’abord souhaité procéder à la mise à l’abri sur la sur la lande, de ceux qui, vulnérables, devaient être mis rapidement en protection. C’est ainsi que l’Etat a décidé de la création d’un Centre d’accueil provisoire capable d’accueillir 1.500 personnes et où il reste encore quelques centaines de places disponibles ;
Nous avons également mobilisé la Sécurité civile pour procéder à la mise à l’abri des femmes et des enfants en situation de vulnérabilité. Il reste également là 500 places disponibles ;
Nous avons décidé de la mise en place d’un accueil de jour qui offre chaque jour aux migrants plusieurs centaines de repas, de manière à éviter que ceux-ci ne se trouvent livrés à eux-mêmes comme cela avait été longtemps le cas à Calais lorsque ces migrants étaient réfugiés dans des squats, sans aucun secours et sans aucune protection.
Nous avons l’intention de procéder à la mise à l’abri, à la mise en protection de tous ceux qui sont sur la zone sud de Calais et notamment des mineurs isolés. Pour ce faire, le ministère de l’Intérieur est mobilisé depuis des semaines pour ouvrir sur le territoire national des centres d’accueil et d’orientation qui permettent aux migrants, encadrés par des associations, de se construire un avenir pour eux-mêmes. Depuis le mois d’octobre, ce sont 2.700 migrants qui étaient sur la lande de Calais, ou sur le camp de Grande-Synthe qui se sont dirigés vers ces centres d’accueil et d’orientation et qui se trouvent désormais encadrés par des associations, des acteurs locaux, dans le cadre d’un parcours destiné à leur permettre d’accéder à l’asile en France.
Comme j’ai pu le constater il y a de cela quelques jours au Mans, beaucoup d’entre eux bénéficient d’un apprentissage de la langue française, et sont accompagnés dans leur parcours migratoire jusqu’à l’asile et jusqu’à l’intégration puisque tel est bien notre objectif.
Il reste aujourd’hui 500 places dans les centres d’accueil et d’orientation auxquelles s’ajouteront 500 places nouvelles au début du mois de mars, et nous ouvrirons dans ces centres d’accueil et d’orientation, autant de places qu’il sera nécessaire pour permettre l’accueil de ceux qui ont besoin de protection, et favoriser leur parcours vers l’asile.
Je veux également indiquer que nous attacherons une attention toute particulière aux 326 mineurs isolés qui ont été décomptés par l’Etat avec le concours de France Terre d’Asile ; ceux-ci pourront d’ores et déjà trouver des solutions sur la lande, mais aussi dans les centres d’accueil et d’orientation ou dans des centres spécialisés.
Nous porterons une attention particulière à la situation de chacun de ces mineurs, y compris dans la relation avec la Grande-Bretagne pour ceux d’entre eux qui ont des parents outre-Manche, et nous ferons en sorte que ces jeunes mineurs puissent avoir accès à l’éducation dans les écoles de la République à l’apprentissage à la langue française et qu’eux aussi puissent se construire un avenir en France.
Contrairement à ce qui a pu être dit au cours des derniers jours, et je le redis solennellement parce qu’en ces matières, la vérité compte, il n’a jamais été question, pour le gouvernement, de procéder à l’évacuation brutale de la zone sud de Calais par la mobilisation de bulldozers en disséminant les migrants partout sur le territoire du nord de notre pays. Cette dissémination n’est pas notre politique. Notre politique, c’est la prise en charge c’est l’encadrement, c’est l’accompagnement de tous ceux qui sont en situation de vulnérabilité, avec un but humanitaire, et par conséquent, l’Etat poursuivra, dès demain sa stratégie d’accompagnement de chacun des migrants vers une solution humanitaire qui soit à la hauteur de ce que sont les valeurs de notre pays et la tradition d’accueil de notre pays pour ceux qui relèvent de l’asile en France.
Je tiens à exprimer ce soir mes sincères remerciements à l’ensemble des fonctionnaires de l’Etat, à la préfète, Fabienne BUCCIO, au sous-préfet de Dunkerque mais aussi à tous leurs collaborateurs, aux collaborateurs de l’OFII, aux collaborateurs de l’OFPRA, à l’ensemble des associatifs qui les accompagnent depuis des mois pour que cette mise en protection de ceux qui ont besoin de trouver la paix et la sérénité en France soit possible.
Les associations ont souhaité être davantage impliquées dans la gestion des centres d’accueil et d’orientation. Bien entendu, le gouvernement y est, depuis l’origine, favorable, et je pense qu’il est hautement souhaitable, dans le contexte migratoire particulier que traverse l’Europe, que nous coalisions nos forces et nos énergies pour réussir la mise en protection de tous ceux qui ont besoin qu’on leur tende la main dans un contexte humanitaire particulièrement difficile.
C’est la raison pour laquelle nous réunirons dans les prochaines heures, avec la ministre du Logement, Emmanuelle COSSE, l’ensemble des associations qui ont souhaité s’engager dans une gestion plus fine des centres d’accueil et d’orientation aux côtés de l’Etat de manière à garantir la transparence de l’action de l’Etat et pouvoir, en très étroite liaison avec elles, offrir les solutions les plus humaines à ceux qui ont besoin de la protection de la France.
Je veux redire ce soir la détermination du ministère de l’Intérieur, dans un contexte migratoire particulièrement difficile, et au sortir d’un conseil Justice – Affaires intérieures de l’Union européenne qui doit appeler la mobilisation de tous les Etats dans la solidarité des uns à l’égard des autres, je tiens à redire ici ce soir notre détermination à réussir l’accueil de tous ceux qui ont quitté leur pays dans des conditions de souffrance extrêmes parce qu’ils étaient persécutés par des barbares qui mettaient en danger leur vie. Ils doivent savoir que nous mettrons tout en œuvre pour les accueillir dignement, mais les passeurs, les organisations internationales de la traite des êtres humains doivent savoir aussi que nous serons intraitables dans le combat que nous menons à l’égard de ces organisations criminelles, combat qui d’ailleurs porte ses fruits puisque ce sont 28 filières qui ont été démantelées dans le nord de la France au cours des derniers mois, représentant près de 700 passeurs, et qu’au cours des dernières semaines, à Grande-Synthe comme à Calais, nous avons encore intensifié notre action.
Et par ailleurs, parce que notre politique est responsable, nous devrons également poursuivre la politique de reconduite vers leur pays de tous ceux qui relèvent de l’immigration économique irrégulière, car si la France veut pouvoir accueillir dignement sur son territoire, les réfugiés, elle doit être en situation d’assumer la reconduite à la frontière de ceux qui ne relèvent pas de ce statut.
Je vous remercie de votre attention.