Discours de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur prononcé à l'occasion de l'hommage funèbre au Lieutenant de police Benoît Vautrin - Tarbes, le 16 avril 2015.
- Seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet du Tarn,
Monsieur le Préfet, Directeur général de la Police nationale,
Monsieur le Préfet de l’Aveyron,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Messieurs les Directeurs départementaux de la Sécurité publique du Tarn et de l’Aveyron,
Chère Elisabeth VAUTRIN,
Chers Monsieur et Madame VAUTRIN,
Mesdames et Messieurs,
Nous voici aujourd’hui tous rassemblés pour rendre hommage au lieutenant Benoît VAUTRIN, victime du devoir, tué vendredi dernier alors qu’il participait à une mission de contrôle routier aux côtés de ses collègues de la circonscription de sécurité publique de Decazeville.
Sa mort brutale est une terrible injustice. Personne – ni sa famille, ni ses collègues, ni lui-même – n’aurait pu imaginer un tel drame, survenu au cours d’une mission de routine.
Benoît VAUTRIN a été la victime de la bêtise criminelle, celle d’un chauffard conduisant en excès de vitesse et sous l’emprise de stupéfiants. A la vue des policiers qui tentaient de l’intercepter, ce dernier a fait demi-tour et a sciemment renversé le lieutenant VAUTRIN, que les secours, malgré leur intervention rapide, n’ont malheureusement pu ranimer.
Le criminel a été interpellé ; il est aujourd’hui incarcéré. Il revient désormais à la justice de faire son œuvre.
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Benoît VAUTRIN n’est pas tombé au hasard.
Il est tombé parce qu’il était policier.
Il est tombé parce qu’il exerçait un métier où l’on prend son service, chaque matin, sans jamais savoir ce que l’on va rencontrer au cours de sa journée de travail, quelles situations l’on va devoir gérer ou affronter. Un policier doit sans cesse faire face à l’urgence, il est parfois confronté au danger. Il sait bien que chaque mission, même la plus anodine en apparence – tel un contrôle routier – peut basculer dans le drame.
Être policier, c’est exercer un métier noble, un métier de courage et d’abnégation, parfois au péril de sa propre vie.
Benoît VAUTRIN est tombé parce qu’il avait fait le choix de cette vie, de cet héroïsme du quotidien.
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Comme nous tous, il avait une famille, des aspirations, des rêves, des joies et des peines. Il était un homme, avec son cœur qui battait à sa propre mesure. Mais il était aussi plus que cela, car il était policier. Car, comme tout policier, il partageait une volonté – celle de protéger ses concitoyens – et un idéal – celui du service de la République.
Car c’est cela, être policier. S’exposer soi-même pour le bien de tous.
Le lieutenant VAUTRIN était fidèle à cette exigence et portait avec honneur et fierté l’uniforme de la Police nationale.
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Les mots ne suffisent pas à rendre le chagrin et l’émotion que nous ressentons tous en cet instant. Je ne peux que deviner la douleur qui est la vôtre, Elisabeth, ainsi que celle de toute votre famille. Je pense aussi, bien sûr, à la petite Roxane, qui n’aura pas la chance de grandir auprès de son papa.
Je pense enfin à la douleur de tous les collègues de Benoît.
Vous avez perdu un époux, un père, un fils, un ami, un collègue. Et rien ne saurait apaiser votre chagrin. J’en ai bien conscience.
A vous tous, je voudrais simplement exprimer ma profonde compassion. Et vous dire ceci : soyez fiers de Benoît.
Soyez fiers de la vie qu’il a menée, des choix qu’il a faits.
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Benoît était en effet un grand professionnel, passionné par son métier. Sa carrière, trop tôt interrompue, fut en tout point exemplaire.
En septembre 2001, une fois diplômé, il fut ainsi affecté à la brigade de service général de la Division de la Police générale et de l’investigation de la police aux frontières de Roissy, où il se distingua rapidement par son efficacité et sa grande rigueur dans l’exercice de ses missions.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il fut repéré et intégra la Brigade anti-criminalité lorsque celle-ci fut créée en 2004. Pendant dix ans, Benoît VAUTRIN a été l’un des piliers de son unité, d’abord parce qu’il était un excellent policier, compétent et engagé. Je pense notamment aux nombreuses affaires de véhicules volés qu’il avait permis de résoudre en intervenant en flagrant délit : c’était là un domaine dans lequel il s’était spécialisé, à la grande satisfaction de sa hiérarchie.
Mais, s’il était un pilier de la brigade, c’était aussi en raison de sa bonne humeur communicative, de son humour et de sa générosité appréciés de tous.
Depuis septembre 2014, il était affecté à la circonscription de sécurité publique de Decazeville. Là aussi, l’expérience et l’efficacité de Benoît firent rapidement merveille. Ses collègues comme ses supérieurs se félicitaient de son arrivée parmi eux. Son attention à autrui, et notamment sa bienveillance à l’égard des plus jeunes et des moins expérimentés d’entre vous, resteront longtemps, je crois, dans les mémoires. Les adjoints de sécurité aimaient travailler à ses côtés, et le considéraient comme un modèle à suivre, tant il était professionnel et respecté pour cela même. La vie d’un policier est parfois faite de drames, mais elle est aussi faite de joies simples, celles que procurent la solidarité et l’entraide entre collègues.
Je veux d’ailleurs avoir une pensée pour les trois policiers qui étaient avec Benoît au moment du drame. Ils sont toujours sous le choc – comme d’ailleurs l’ensemble des membres du service auquel il appartenait.
A tous ses collègues, je voudrais dire ceci : je sais que Benoît va terriblement vous manquer, mais soyez heureux de l’avoir côtoyé, d’avoir eu la chance de travailler avec lui.
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Elisabeth, Roxane, ainsi que vous ses parents, et vous tous qui avez travaillé aux côtés de Benoît, toutes mes pensées, tous mes sentiments sont pour vous.
Sachez que, dans cette épreuve, vous n’êtes pas seuls. Nous tous ici présents partageons la même peine.
La Police nationale est aujourd’hui en deuil, plus que jamais solidaire, comme à chaque fois qu’un tel drame survient.
Le Gouvernement aujourd’hui s’incline respectueusement devant le corps de Benoît VAUTRIN, tombé en service.
En reconnaissance de l’État pour les services rendus et en hommage à sa carrière tragiquement interrompue, Benoît VAUTRIN a été élevé au grade de Lieutenant de police. Il est cité à l'Ordre de la Nation et dans un instant, il sera décoré des insignes de Chevalier de la Légion d’Honneur, de la Médaille de la Sécurité Intérieure, de la Médaille pour Acte de Courage et de Dévouement et de la Médaille d’Honneur de la Police Nationale, échelons or.
Nous saluons avec émotion le souvenir de Benoît VAUTRIN, qui a payé de sa vie son choix de servir les Français. Que ses proches sachent qu'il a fait honneur à la Police nationale.
A Benoît VAUTRIN et à tous les fonctionnaires de la Police nationale, à vous tous ici présents, je veux dire que nous savons ce que nous vous devons. La République sera éternellement reconnaissante à celles et ceux qui la servent, avec courage et abnégation.
Le dévouement de Benoît VAUTRIN restera à jamais gravé dans nos mémoires et dans nos cœurs.