Discours de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, à l'occasion des vœux à la Police nationale - ENSP Saint-Cyr-au-Mont-d’Or – 15 janvier 2016
- Seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Directeur général de la Police nationale,
Madame la Directrice de l’École Nationale Supérieure de la police,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs,
L’année dernière, à l’occasion de cette même cérémonie des vœux, j’avais affirmé que les épreuves ne manqueraient pas et que nous devions nous préparer à faire face à de nombreux défis, en raison des graves déséquilibres qui troublent notre époque. La succession d’épisodes tragiques auxquels nous avons été confrontés en 2015 a confirmé ce qui, loin de relever de la prémonition, s’imposait comme le fruit d’une analyse lucide des faits et des événements. D’une crise à l’autre, l’année qui vient de s’achever nous aura tous mis à rude épreuve, et d’abord VOUS, les femmes et les hommes qui servez au sein des forces de sécurité.
Voici un an, en effet, le terrorisme de DAESH nous frappait pour la première fois sur notre sol, à Paris et à Montrouge, provoquant la mort de dix-sept de nos compatriotes, parmi lesquels se trouvaient deux de vos collègues, les lieutenants Franck BRINSOLARO et Ahmed MERABET, abattus par les terroristes de « Charlie Hebdo ». Je n’oublie pas non plus le brigadier Clarissa JEAN-PHILIPPE, jeune policière municipale tuée en service pour le simple motif qu’elle portait l’uniforme.
Le 13 novembre dernier, les djihadistes ont à nouveau ensanglanté les rues de la capitale et les abords du stade de Saint-Denis, assassinant 130 victimes innocentes et faisant en outre des centaines de blessés.
Entre ces deux attaques criminelles, deux autres innocents avaient croisé la route de terroristes qui les ont purement et simplement exécutés, dans l’huis-clos d’un véhicule, sans doute les yeux dans les yeux : Aurélie CHATELAIN, le 19 avril à Villejuif et Hervé CORNARA le 26 juin à Saint Quentin–Fallavier.
Jamais, jusqu’alors, nous n’avions eu à affronter, à l’intérieur même de nos frontières, des attaques terroristes d’une telle ampleur et d’une telle abjection.
Après l’attaque massive et coordonnée de novembre, le Président de la République a pris les mesures exceptionnelles qui s’imposaient, en conformité avec nos lois et nos engagements internationaux. L’état d’urgence a été décrété puis prorogé sur l’ensemble du territoire national afin de donner aux autorités, dans un tel contexte, les moyens de préserver l’ordre public et de prévenir la commission de nouveaux attentats.
A la terreur, la France a également opposé la mobilisation tout aussi exceptionnelle de l’ensemble des forces de sécurité et des services de secours, renforcés par les effectifs de nos Armées. A ce titre, vous avez été mobilisés partout dans le pays, pour traquer les terroristes et garantir la sécurité des Français. Tous les métiers de la police et de la gendarmerie ont été sollicités, renseignement, police judiciaire, sécurité publique, ordre public, police aux frontières, police technique et scientifique, forces d’intervention spécialisées. J’ai conscience que, depuis les attentats de janvier 2015, cette mobilisation, renforcée par l’état d’urgence, a entraîné un niveau de sollicitation inédit, un engagement de tous les instants. Je sais que chacun d’entre vous a pris et continue de prendre sa part de cet effort collectif et solidaire, parce qu’il s’agit de servir l’intérêt général, parce que chacun a compris, quel que soit le niveau de ses responsabilités, que la France était atteinte. Non seulement par le sang versé de nos compatriotes et nos amis étrangers tués par d’abjects criminels. Mais aussi par la volonté de mettre à bas nos valeurs, et de rejeter trois mots qu’exècrent ceux qui nous attaquent : Liberté, Egalité, Fraternité.
Les Français, dont nous pouvons être très fiers, ont opposé deux réponses :
A cette reconnaissance, je joins mes propres sentiments de gratitude, pour avoir été à vos côtés, pour avoir perçu très directement la force de votre engagement sur le terrain, aux heures les plus sombres. J’y joins aussi un sentiment de fierté, pour conduire un ministère riche des femmes et des hommes que vous êtes, dans ces moments d’extrême tension comme dans la police du quotidien qui jamais, jamais, n’est exempte de risque.
Le Président de la République a remis, la semaine dernière, à plusieurs de vos collègues, les insignes de Chevalier de la Légion d’Honneur pour avoir contribué de façon décisive, chacun dans son rôle et chacun au sein de son unité – la BAC, le RAID, la BRI – à la neutralisation des terroristes de janvier et de novembre.
Ces hautes distinctions rejaillissent sur toute la police nationale. Soyez en fiers, et soyez fiers d’eux. J’ai bien sûr une pensée toute particulière pour le commissaire et le brigadier de la BAC qui ont manifesté un courage absolument hors du commun en pénétrant les premiers dans la salle du Bataclan où ils ont dû affronter l’horreur. Cette nuit-là, malgré l’extrême danger qu’ils encouraient, ils n’ont pas hésité une seconde à accomplir leur devoir de policiers, dans des conditions d’intervention que nul d’entre nous ne saurait imaginer, neutralisant ainsi l’un des trois terroristes et sauvant par là même de nombreuses vies. Car tel est l’honneur de cette police du quotidien qu’incarnent vos deux collègues, cette police qui, dès lorsqu’un drame survient, se retrouve en première ligne et en assume tous les risques.
Il faut pour cela disposer de grandes qualités de courage, de sang-froid, d’intelligence des situations, de maîtrise technique. Mais il faut évidemment avoir chevillée au corps et au cœur le dévouement à la République. Ce sont les qualités des femmes et des hommes qui s’engagent au sein des forces de l’ordre. Sans doute faut-il les porter déjà en soi pour choisir d’exercer un tel métier, car on n’est pas policier par hasard ou par défaut. Mais, quelles qu’en soient les étapes, toute votre carrière vous conduit à les développer. Elles vous permettent d’accomplir vos missions quotidiennes dans des conditions souvent difficiles, et d’affronter des situations que nos concitoyens peinent souvent à imaginer.
Avec vous tous, j’ai une pensée très émue pour tous vos collègues tombés au cours de l’année écoulée dans l'accomplissement de leur devoir : Franck BRINSOLARO, Ahmed MERABET et Clarissa JEAN-PHILIPPE, dont j’évoquais à l’instant le sacrifice. Mais, je veux également faire résonner ce matin les noms du lieutenant Benoît VAUTRIN, tué le 10 avril, dans l’Aveyron, par un chauffard au cours d’un contrôle routier, comme celui du major Samuel GALLET, décédé le 15 décembre après être intervenu, dans des conditions particulièrement délicates, sur un différend familial, à Berck, dans le Nord. Je veux dire à leurs familles, à leurs proches et à leurs collègues que jamais nous ne les oublierons, comme nous n'oublions aucun des policiers blessés cette année en opération, comme le fût Yann SAILLOUR, grièvement atteint à l’Isle-Saint-Denis le 5 octobre dernier. Nous leur souhaitons tous de recouvrer la santé, l’autonomie, entourés de l’affection des leurs, forts du soutien de leurs collègues et amis, et de l’attention soutenue et permanente de notre administration.
En 2015, si les crises se sont succédé sans jamais vous laisser un instant de répit, vous avez été engagés sur tous les fronts à la fois. Car, parallèlement au combat que nous menons contre la menace djihadiste, vous n’avez jamais cessé de lutter contre les formes plus quotidiennes de délinquance. Vous avez également assumé les exigences du maintien de l’ordre public dans un contexte de risque accru, notamment à l’occasion des fêtes de fin d’année et surtout lors de la COP 21 qui ont constitué de grands succès pour les forces de l’ordre. Elles ont démontré, une fois de plus, qu’elles étaient capables de garantir la sécurité de tels événements exceptionnels, de portée internationale tant les regards du monde étaient tournés vers nous. C’est, là encore pour moi, un authentique motif de fierté, de fierté pour VOUS et, de cela aussi, je voulais vous remercier.
Il y a eu enfin l’aggravation de la crise migratoire, ses conséquences en matière de lutte contre l’immigration irrégulière et contre les filières clandestines qui l’alimentent, les procédures complexes qu’elles engendrent, les opérations répétées d’ordre public, en particulier à Calais autour du site d’Eurotunnel, du port, et sur les axes routiers et ferroviaires qui y conduisent. Je n’oublie pas les nombreuses opérations de démantèlement des squats, en particulier à Paris, effectués avec une grande maîtrise, malgré les provocations de tous ordres.
Nous savons, là encore, comme pour le terrorisme, que cette crise s’installe dans la durée, qu’elle exige une action dans le temps, déterminée, où l’humanité doit se combiner à la fermeté pour rendre soutenable nos politiques d’accueil des authentiques réfugiés en besoin de protection. Je sais combien la tâche est rude, combien le découragement peut être une tentation face à des situations dont on a peine à deviner le terme, face aux critiques injustes de commentateurs superficiels, face aux provocateurs qui soufflent sur les braises.
Je sais ce qu’il faut de courage et de foi en sa mission pour tenir. Et si le doute peut parfois vous atteindre, sachez que votre action est un élément essentiel, indispensable à la maîtrise de ce phénomène qui met l’Europe au défi. C’est grâce à elle, soyez-en persuadés, que la parole de la France que je porte est forte, crédible et responsable dans les instances européennes qui détiennent une part importante des solutions à apporter.
Je connais donc la force de votre engagement, de même que je mesure le prix des sacrifices que vous consentez au service du bien commun. Je sais aussi la part que prennent vos familles dans cet engagement quotidien. Je n’ignore pas leur patience, leur inquiétude et la force de leur soutien. C’est la raison pour laquelle je tenais à venir vous présenter aujourd’hui, à tous, mes remerciements les plus sincères et les plus chaleureux pour le courage et l’exemplarité sans faille dont vous avez fait preuve au service des Français et de la République, tout au long de cette année terrible.
Jamais les policiers et les gendarmes n’ont été aussi exposés, victimes d’agressions de toute sorte, parfois d’une extrême gravité. Nous savons désormais que vous êtes confrontés à de nouveaux dangers, puisque le seul fait de porter l’uniforme et d’incarner l’autorité publique suffit à faire de vous des cibles. L’attentat déjoué par vos valeureux collègues du commissariat de La Goutte d’Or, la semaine dernière, dans le 18ème arrondissement de Paris, est venu nous le rappeler une fois encore, nous remettant en mémoire l’attaque du commissariat de Joué-les-Tours de décembre 2014.
Plus que jamais, l’État de droit et l’autorité de l’État que vous représentez constituent les fondements de la cohésion nationale, garantissent la force du droit contre la loi du plus fort, et font prévaloir le bien commun sur les intérêts particuliers. Elle s’appuie sur nos lois, sous le contrôle des deux ordres de juridiction, pour qu’il n’y ait jamais de confusion entre « autorité de l’Etat » et « Etat autoritaire », comme voudraient le faire croire certaines postures, jusqu’à justifier parfois qu’il puisse y avoir une violence légitime exercée contre les forces de l’ordre.
A vous tous donc, que vous serviez dans les directions centrales, dans les services territoriaux, dans les unités spécialisées, dans des fonctions opérationnelles ou de soutien, en métropole comme outre-mer ou dans nos postes à l’étranger, je vous renouvelle donc ma profonde gratitude et vous assure de mon indéfectible soutien.
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En 2016 comme en 2015, nous le savons bien, nombreux seront à nouveau les défis qu’il nous faudra relever. Nous continuerons de lutter avec la plus grande fermeté et la plus grande détermination contre toutes les formes de criminalité et de délinquance. C’est notre première responsabilité, le socle de votre mission. L’année qui s’ouvre s’annonce donc tout aussi dense et exigeante que celle qui vient de s’achever.
Je veux rendre hommage à votre action car, malgré les crises que je viens d’évoquer et qui ne nous ont pas épargnés, vous avez tenu le terrain et le cap : les tendances observées sont en effet encourageantes, que nous devons amplifier en 2016. Ainsi, au cours des 12 derniers mois, le nombre de vols commis avec une arme a très nettement diminué (- 13,7%), comme les vols violents commis sans arme (- 9,4%). Celui des cambriolages a reculé de près de 1% (- 0,9%), rompant avec une progression régulière sur une longue période. La même inflexion est constatée pour les vols sans violence ciblant des particuliers (-1,4%). Les vols liés aux véhicules sont également orientés à la baisse (- 0,9%), tandis que les vols d’accessoires connaissent une diminution plus forte encore (- 7,8%). Cette tendance, bien entendu, devra s’amplifier.
C’est pourquoi je vous demande de poursuivre avec la même détermination et le même talent votre action dans le cadre des différents plans de lutte ciblés qui ont été mis en place contre les trafics d’armes, contre les trafics de stupéfiants, contre les cambriolages, ou encore contre les vols liés à l’automobile. De même, votre présence renforcée sur la voie publique doit demeurer une priorité absolue, a fortiori dans le contexte actuel.
Nous travaillons à cet objectif. Résolument. Et sur plusieurs axes.
D’abord, en renforçant considérablement nos effectifs.
Vous le savez, la décision d’interrompre la RGPP a permis de mettre un terme à la déflation délibérée des effectifs en remplaçant tous les départs à la retraite et en créant près de 500 emplois nouveaux par an dans les deux forces. A cette politique de fond, trois plans pluriannuels sont venus s’ajouter :
Alors que la Police et la Gendarmerie avaient perdu plus de 13.000 emplois entre 2007 et 2012, nous en aurons recréés plus de 9000 durant ce quinquennat.
Ainsi, pour la seule police nationale, en 2016, ce sont près de 4.700 élèves gardiens de la paix (4677) qui sortiront de nos écoles. Ils étaient 488 en 2012. Le rapprochement de ces deux chiffres, suffit à démontrer l’ampleur de l’effort accompli. Une multiplication des recrutements par 10 !
Et cet effort sera poursuivi en 2017 puisque nos écoles formeront 4615 fonctionnaires du corps d’encadrement et d’application.
La première réponse à l’objectif de présence sur la voie publique est donc capacitaire. Elle est essentielle.
Mais nous nous emploierons également à revisiter l’étendue de vos charges. Une réflexion est engagée pour un nouveau plan de réduction des tâches indues ou inutiles, par un effort de simplification de nos process internes.
Dans le même esprit, le projet de loi que défendra dans les toutes prochaines semaines la Garde des sceaux devant le Parlement comprendra un important volet de simplification de la procédure pénale. Ce sont là, également, deux engagements forts du Président de la République, réaffirmés lorsqu’il a reçu à l’Elysée, le 22 octobre dernier, les organisations syndicales représentatives.
La présence de voie publique est essentielle. Et, dans les temps troublés que nous traversons, elle vous expose. La très grave agression dont a été victime Yann SAILLOUR, à l’Ile-Saint-Denis, alors qu’il intervenait avec ses collègues de la BAC pour interpeller deux braqueurs en fuite, en témoigne de façon particulièrement révoltante. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de renforcer considérablement les équipements (armes, protections, véhicules) dont disposent les policiers des BAC pour mieux se protéger contre les violences dont ils peuvent faire l’objet dans l’accomplissement de leurs missions. L’ambitieux Plan BAC que j’ai présenté le 29 octobre à Rouen repose également sur deux autres aspects fondamentaux : une meilleure formation des personnels pour mieux sécuriser leurs interventions et l’élaboration d’une doctrine spécifique d’intervention.
Vous êtes impatients de constater la réalité de ses équipements, dans vos commissariats et dans vos services. Mon cabinet, le DGPN et le chef du SAELSI savent combien mon impatience n’a d’égale que la vôtre et combien mes instructions pressentes et répétées les exhortent à concrétiser au plus vite ces annonces, même si chacun peut comprendre que certaines procédures de commandes publiques obéissent à des règles parfois indépassables, ou que les aménagements techniques de véhicules exigent des interventions logistiques qui peuvent prendre du temps. Mais il faut aller vite, et c’est pour moi, je le redis fermement, une absolue priorité.
En 2015, nous avons tenu nos engagements, puisque 2 269 véhicules ont été livrés, ainsi que l’ensemble des renforts en armements et en matériels de protection que nous avions annoncés – je pense notamment aux 6 514 gilets pare-balles individuels. Dans le cadre du Plan anti-terroriste qui est venu amplifier notre effort, nous avons investi plus de 30 millions d’euros en armements et en matériels de protection. En 2016, cet effort massif sera poursuivi et je me rendrai sur place, dans vos services, dans les ateliers, pour le constater.
En matière d’action opérationnelle, j’ai également demandé aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, comme au Préfet de Police, de travailler à la mise en place d’une doctrine partagée, définissant les rôles et les fonctions des primo-intervenants, tout particulièrement en cas de tueries de masse. Cette doctrine doit bien évidemment intégrer les moyens supplémentaires en armement et en protection permettant aux policiers de réagir efficacement et en sécurité lorsque surviennent de tels événements. Elle doit également porter sur la coordination entre les primo-intervenants et l’échelon supérieur d’intervention constitué par la BRI ou le RAID. Les conclusions de ces travaux me seront rendues à la fin du mois. L’Unité de coordination des forces d’intervention (l’UCOFI) travaille actuellement, sur la base d’un mandat commun du DGPN, du DGGN et du Préfet de Police, à l’élaboration d’une coordination des forces d’intervention GIGN, RAID et BRI, dans la cadre d’un schéma national qui verra la création de nouvelles antennes du RAID.
Les enjeux sont importants, en termes de couverture territoriale, d’efficacité de chaque service dans sa zone de compétence ou dans son domaine d’excellence, de mutualisation des savoir-faire et des disponibilités. Ce sont ces enjeux et notre capacité à les traiter avec efficacité – mais aussi avec efficience – qui guideront les décisions que je prendrai rapidement à cet égard.
Au-delà, des effectifs qui s’accroissent et des moyens des services qu’il faut renforcer et moderniser pour tirer le meilleur parti du numérique dans nos process comme dans nos rapport à la population, le Président de la République s’est engagé à marquer la reconnaissance due aux policiers par un agenda social pluriannuel qui doit conduire à revaloriser les carrières, à fluidifier les parcours professionnels pour leur offrir plus de lisibilité et réduire le sentiment de désespérance qu’induit parfois l’embolisation de l’accès à certains grades. Je ne la détaillerai pas devant vous, puisque j’ai adressé aux organisations syndicales de tous les corps, actifs, administratifs, techniques et scientifiques, la feuille de route qui décline cet agenda. Sachez cependant que les services de la DRCPN ont, sous la conduite de Jean-marc FALCONE et de Michèle KIRRY, entrepris un travail technique considérable, et des discussions serrées avec nos partenaires de Bercy et de la fonction publique, responsables des grands équilibres, budgétaires et statutaires. Une première réunion interministérielle s’est déroulée à Matignon le 12 janvier. Mercredi prochain, une seconde réunion conclusive sera arbitrée pour préciser le cadre opérationnel de la négociation qui s’ouvrira immédiatement avec les syndicats. Nous avons une obligation de résultats dans un calendrier ramassé, fixé par le Chef de l’État au terme du mois de Mars prochain. Je veux croire qu’à la hauteur des efforts et des budgets dégagés, répondra une attitude constructive de tous les partenaires. Je sais pouvoir compter sur leur esprit de responsabilité.
Certaines mesures exigeront des modifications de textes en vigueur. Mais la gestion des ressources humaines ne sera pas le seul thème sur lequel nous aménagerons le cadre juridique qui régit votre action. Comme le Gouvernement en a pris l’initiative avec les trois projets de loi adoptés en 2012, 2014 et 2015 sur le renforcement de la lutte anti-terroriste et le renseignement, nous poursuivrons l’adaptation de nos outils législatifs pour vous doter de moyens d’actions nouveaux et efficaces. Ainsi, à la faveur du projet de loi relatif à la procédure pénale que j’évoquais à l’instant, un important volet sera consacré à des mesures initiées par le ministère de l’intérieur. Seront ainsi créés un régime de contrôle administratif des retours sur le territoire national après un séjour sur un théâtre d’opérations terroristes, un régime de retenue pour vérification de la situation administrative des individus signalés, un nouveau cadre de contrôle administratif des flux de personnes et de véhicules. Ce texte prévoira également une nouvelle exonération de responsabilité pénale des forces de l’ordre, pour mieux assurer la sécurité des personnels et des citoyens qu’ils protègent, dans le cas très particulier d’usage des armes lors de périples meurtriers. Il organisera enfin le cadre juridique de l’emploi des caméras-piétons qui permettront tout à la fois de protéger les personnels en objectivant les situations et en faisant baisser la tension lors de situations délicates que vous rencontrez trop souvent.
Effectifs, moyens, cadre juridique, ce sont tous ces chantiers qui sont ouverts, annonciateurs d’une année dense, mais avec des contenus et des calendriers définis. Je ne suis pas de ceux qui font des promesses qui n’engagent que ceux qui les écoutent. Et la fierté, la gratitude que je témoigne à votre égard implique pour moi une exigence forte : ne pas vous décevoir, ne pas tout promettre, ne pas laisser accroire que tout est possible, mais tenir ce qui a été promis dès lors que cela est possible.
Mais au-delà des moyens et du droit, il y a aussi la méthode. La fluidité des échanges d’informations, la complémentarité des forces, la mutualisation des compétences, la rationalisation du maillage territorial pour plus d’efficacité et davantage de disponibilité opérationnelle, les nouvelles technologies comme moyen d’action ou comme terrain de chasse, la nécessité d’investir des domaines stratégiques comme l’est devenu celui de la lutte contre la fraude documentaire, notamment pour la prévention du terrorisme et la lutte contre l’immigration clandestine, ce sont là autant de thèmes sur lesquels nous devrons également aboutir, en 2016, à des résultats concrets.
Certains de ces chantiers ont également des exigences européennes. 2016 sera pour moi une année d’investissement résolu auprès de mes partenaires de l’Union pour faire avancer des dossiers majeurs. De beaux succès ont été engrangés en 2015 : j’en veux pour preuve l’immense travail de persuasion de la France pour l’adoption d’un PNR européen efficace, qui sera juridiquement une réalité européenne dès le mois de février. L’évolution du droit européen sur la réglementation des armes, leur commerce et les conditions de leur neutralisation est aussi une autre bataille gagnée. Mais d’autres frilosités restent à vaincre et constitueront mes prochains combats, notamment en matière de coopération sur le renseignement, de contrôle effectif de nos frontières extérieures ou de lutte coordonnée contre l’immigration clandestine.
C’est votre propre détermination qui alimente la mienne, c’est votre énergie qui fortifie ma conviction.
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Mesdames et Messieurs, vous avez choisi de servir une institution présente sur tous les fronts, comme l’a encore démontré l’année qui s’achève. Vous avez choisi un métier des plus exigeants, qui se complexifie à mesure des évolutions de la société.
2016, je viens de vous le dire, sera une année riche de travail et de résultats. Comme la COP 21 en décembre dernier, nous savons qu’en plus de tout le reste, nous aurons à gérer la sécurité de l’Euro 2016 et démontrer, une fois encore et sous le regard du monde entier, notre professionnalisme. Ce sera aussi, nous le savons, une année durant laquelle nos ennemis ne nous laisseront pas de répit, une année qui nécessitera notre vigilance de tous les instants, notre lucidité, notre courage, nos solidarités.
Je souhaite qu’elle soit aussi l’année de l’engagement et que ce beau mot enrichisse ceux qui qualifient déjà le ministère de l’intérieur, tout à la fois ministère des sécurités, de la paix publique, des libertés publiques, de l’administration des territoires et de la démocratie. En un mot, le ministère « de l’Etat ». Mais, en cette année 2016 qui commence, attachons nous également à en faire le ministère de l’engagement. Pas seulement l’engagement des hommes et des femmes qui le servent et se dévouent déjà pour lui, mais l’engagement de tous ceux qui, ébranlés par les tragiques événements de 2015, se sont sentis animés d’un sens civique oublié, endormi ou refoulé. Il nous faudra entretenir cette flamme pour qu’elle ne vacille pas, faire des citoyens les acteurs de leur propre sécurité, à vos côtés, explorer toutes les voies qui permettent à nos compatriotes de donner corps à leur envie de se consacrer aussi à la collectivité. Cadets, réservistes, service civique, les outils ne manquent pas et sans doute faut-il en développer la palette. C’est ce que je souhaite en tout cas pour que le regard change et que ce que l’on a appelé « l’esprit du 11 janvier » puisse trouver à s’accomplir aux côté des forces, pour une société plus apaisée et plus solidaire.
A chacune et à chacun d’entre vous, je souhaite les succès professionnels et l’épanouissement personnel auxquels vous aspirez. A travers vous, j’adresse mes vœux chaleureux à vos familles et à vos proches, qui vous soutiennent au quotidien.
A l’École Nationale Supérieure de la Police qui nous accueille aujourd’hui, symbole d’excellence et d’avenir puisqu’elle y forme les cadres de la police de demain, je souhaite une bonne et heureuse année 2016.
Vive la Police Nationale,
Vive la République,
Et Vive la France !