Hommage au Caporal-chef Robert Sandraz, décédé en opération en Savoie

Hommage au Caporal-chef Robert Sandraz, décédé en opération en Savoie
9 janvier 2018

Discours de M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’Intérieur, prononcé lors de l'hommage funèbre en hommage au Caporal-chef Robert Sandraz, le 9 janvier 2018.


- Seul le prononcé fait foi -

Monsieur le Préfet du département de la Savoie, Louis LAUGIER

Monsieur le Préfet, Directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, Jacques WITKOWSKI

Monsieur le Ministre, Président du Conseil Départemental, Hervé GAYMARD

Monsieur le Ministre, Louis BESSON

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,

Monsieur le Maire de La Rochette, André DURAND

Monsieur le Maire de Presle, Eric COVAREL

Monsieur le Président du Conseil d’Administration du Service d’Incendie et de Secours de la Savoie, Gaston ARTHAUD-BERTHET

Monsieur le Directeur du Service d’Incendie et de Secours de la Savoie, colonel Emmanuel CLAVAUD

Monsieur le Vice-Président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, colonel Grégory ALLIONE

Monsieur le vice-président de l’Œuvre des Pupilles de sapeurs-pompiers, colonel Yves DANIEL Monsieur le Président de l’Union départementale des sapeurs-pompiers, colonel Pascal BOJUC Officiers, sous-officiers, caporaux et sapeurs,

Mesdames et Messieurs,

Chère Hélène,

Chers Stéphanie, Frédéric et Nicolas,

Il n’y a pas de mots.

Il n’y a pas de mots pour exprimer la douleur que nous ressentons tous au moment de rendre un hommage solennel au sergent Robert SANDRAZ, sapeur-pompier volontaire ici, à la Rochette, depuis près de trente ans.

Tout bascula jeudi dernier.

Le Centre d’incendie et de secours de la Rochette se trouvait en pleine activité.

Inondations, chutes d’arbres, toitures arrachées : le passage de la tempête Eleanor donnait un immense travail aux sapeurs-pompiers de Savoie, comme d’ailleurs à tous les sapeurs-pompiers de France qui, ces jours-là, assumèrent pas moins de 5 interventions par minute.

Un appel téléphonique survint alors. Deux personnes et un nourrisson se trouvaient bloqués sur le toit d’un véhicule entraîné par une coulée de boue, dans les gorges du Bréda, sur la commune de Détrier. Il fallait agir vite.

De par ses années d’expérience, le sergent Robert SANDRAZ connaissait très bien cette zone. C’est donc naturellement qu’avec son équipage, il se rendit immédiatement sur le site.

Arrivé sur les lieux, il contribua à mettre en place un dispositif qui permit de sauver les trois personnes concernées.

Courageusement, il partit ensuite en reconnaissance, pour évaluer la situation d’un deuxième véhicule emporté par une coulée de boue.

C’est alors que survint le drame.

Victime d’un affaissement du sol, Robert SANDRAZ fut emporté par la rivière en crue, sous les yeux de ses équipiers ; sous les yeux de son fils Nicolas.

Immédiatement, d’importants moyens furent mis en œuvre pour lui porter secours. 35 sapeurs- pompiers, 25 gendarmes, 3 équipes cynophiles, 2 hélicoptères, de nombreux moyens nautiques.

En vain. Le corps sans vie de Robert SANDRAZ fut retrouvé le lendemain.

***

En cet instant, je pense bien sûr à vous Hélène, son épouse.

Je pense à ses enfants Stéphanie, Frédéric, Nicolas – votre père était si fier de vous.

Je pense à ses petites filles, Emma, 6 ans, et Elina, 2 ans, avec qui il aimait passer les rares moments de libres dont il disposait depuis sa retraite professionnelle.

Je pense aux sapeurs-pompiers de ce centre de secours de la Rochette, aux sapeurs-pompiers de Savoie, qui avaient salué la carrière de Robert SANDRAZ en lui remettant, il y a quelques semaines, la médaille de bronze de la sécurité intérieure.

Je pense à tous les sapeurs-pompiers du pays et en particulier aux 194 000 volontaires qui ont choisi de consacrer une partie de leur temps à secourir, protéger, qui ont choisi de consacrer leur vie à sauver celle des autres.

A vous qui perdez un mari, un père, un grand-père, un collègue, un ami, j’adresse, au nom du Président de la République, mes condoléances les plus attristées.

Aujourd’hui, la Nation toute entière s’incline devant votre douleur.

Si je suis ici, Mesdames et Messieurs, c’est aussi pour dire avec force, combien le sergent SANDRAZ – pour reprendre votre expression à tous - était quelqu’un de bien, une belle personne.

Robert SANDRAZ était l’âme de la caserne de la Rochette. Doyen du centre d’incendie et de secours, il continuait à assurer de nombreuses heures d’astreinte, à partir régulièrement en intervention. Il répondait toujours présent pour réaliser de petits travaux, réparer les véhicules, pour mettre l’ensemble de ses compétences au service du collectif.

Il aimait aussi transmettre son expérience aux plus jeunes. Il était profondément heureux et fier que son fils Nicolas ait choisi comme lui de devenir sapeur-pompier volontaire. Et à chaque fois qu’on le sollicitait pour assurer une formation auprès des jeunes sapeurs-pompiers du département, c’était toujours avec empressement qu’il le faisait.

Robert SANDRAZ, c’était l’incarnation de l’engagement désintéressé au service des autres.

A votre grand désespoir, chère Hélène, il ne quittait jamais son « bip » parce que l’idée de ne pas répondre présent pour sauver, pour secourir, lui était insupportable. Et si, à regret, il s’était résolu à prendre sa retraite de sapeur-pompier volontaire au mois d’avril, il s’était déjà trouvé un autre engagement.

Depuis trois ans, Robert SANDRAZ était en effet conseiller municipal de son village de Presle. Là encore, il remplissait ce rôle avec enthousiasme.

Parce qu’il faisait dans cette fonction ce qu’il aimait au plus profond de lui-même : s’engager au service de cette Savoie qu’il appréciait, être sans cesse aux côtés de ses concitoyens pour les aider, pour les accompagner dans les différentes étapes de leur vie.

Robert SANDRAZ, c’était enfin l’humanité-même.

Dans la caserne, il était l’homme du bon mot, du compliment chaleureux, de la jovialité à toute épreuve. C’était aussi celui qui consolait les peines. « Jamais de problèmes, toujours des solutions », tel était son leitmotiv. Et c’est vrai, au contact de Robert SANDRAZ, chaque difficulté semblait s’évaporer. Avec une phrase qui pansait toutes les plaies. Ou autour d’un repas, car Membre de l’Amicale des Sapeurs-pompiers de Presle, il aimait, l’été venu, « brasser la polente » pour le plaisir de tous ceux qu’il aimait.

***

Bien sûr, comme l’ensemble des sapeurs-pompiers de ce pays, Robert SANDRAZ savait les risques inhérents à ses missions. Bouleversé à chaque fois que, quelque part en France, un de ses collègues perdait la vie en intervention, il vivait dans sa chair la devise des soldats du feu : Sauver ou Périr.

Aujourd’hui, c’est nous qui sommes bouleversés.

C’est toute la famille des sapeurs-pompiers qui est infiniment attristée, l’ensemble du Ministère de l’Intérieur qui est en deuil.

C’est toute la France qui pleure un de ses héros.

Sergent Robert SANDRAZ,

Jamais ici, à la Rochette, dans le département de la Savoie bien sûr, mais aussi partout en France, on ne vous oubliera. Jamais on n’oubliera votre sourire, votre humour, votre humanité.

Vous êtes, pour tous les sapeurs-pompiers de ce pays, un exemple de courage et de dévouement. Et pour les jeunes Français qui cherchent à donner un sens à leur vie, vous êtes un véritable modèle.

En reconnaissance de votre dévouement au service des autres et de votre sacrifice, vous avez été élevé au grade de sergent et allez être cité à l’ordre de la Nation.

Au nom du Président de la République, je vous remettrai dans un instant, les insignes de chevalier dans l’ordre national de la légion d’honneur à titre posthume.

Sergent Robert SANDRAZ,

Aujourd’hui, le cœur lourd, nous vous disons un dernier « au revoir » - « ARVI PA ! » comme on dit ici en Savoie.