Déclaration de Bernard Cazeneuve après les attentats du 13 novembre 2015

14 novembre 2015

Déclaration de M. Bernard CAZENEUVE, Ministre de l’Intérieur.
Hôtel de Beauvau, 14 novembre 2015.

Seul le prononcé fait foi

Mesdames et messieurs,

Confrontée en son territoire à un acte de guerre terroriste planifié depuis l’extérieur d’une barbarie sans précédent, la France fait face avec courage et dans l’union nationale.
Nous sommes d’abord aux côtés des victimes, frappées hier soir de manière abjecte, aux côtés de leurs familles, de leurs proches, dans le deuil et le chagrin. Dans le cadre des trois jours de deuil national décrétés par le Président de la République, et à la demande du Premier Ministre, j’ai demandé aux préfets d’organiser lundi 16 novembre à 12heures un moment de recueillement permettant aux agents publics de s’associer à cet hommage.

Nous sommes ensuite unanimes en soutien pour nos forces de l’ordre qui s’engagent totalement dans ce combat contre la barbarie, comme en a témoigné hier soir encore le courage des policiers et des gendarmes du RAID, de la BRI, et du GIGN au moment de l’assaut donné pour libérer les otages du Bataclan de la sauvagerie des terroristes.

Les sapeurs-pompiers et l’ensemble des services de secours engagés cette nuit, au milieu de l’horreur d’actes barbares, ont une fois encore fait preuve d’un courage, d’une bravoure et d’une générosité hors du commun. Je veux leur dire du fond du cœur, ma plus profonde gratitude pour leur héroïsme. Je me rends dans quelques minutes à la brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris pour leur dire mes remerciements.

Et c’est l’ensemble des forces de sécurité du pays sont en alerte maximale Tous les policiers, les gendarmes, les sapeurs-pompiers, les militaires sont engagés pour neutraliser les terroristes et assurer la protection des Français. Je tiens à leur rendre un hommage solennel pour leurs interventions de la nuit, auprès de nos compatriotes si durement touchés dans leur chair et dans leur cœur. C’est aussi grâce à eux que la France est et restera debout. Je salue l’élan d’unité nationale et de soutien à nos forces de l’ordre qui s’est exprimé avec clarté dès hier soir de la part de l’ensemble des sensibilités politiques républicaines.

Une enquête judiciaire a été immédiatement ouverte sous l’autorité du Procureur de Paris, elle permettra d’éclairer toutes les circonstances de ces actes barbares. François Molins de s’exprimera sur cette enquête en temps voulu.

A la suite des décisions exceptionnelles prises par le Président de la République et le Premier Ministre dès hier soir et ce matin lors du conseil de défense réuni à l’Elysée, je souhaite  préciser le dispositif opérationnel qu’elles impliquent, à la fois en termes de sécurité et de mobilisation des forces de l’ordre.

En ce qui concerne l’état d’urgence en premier lieu. Je précise qu’il a été instauré par un décret pris en conseil des ministres cette nuit, et qu’il est d’application immédiate, sur l’ensemble du territoire métropolitain. Il implique dans certains cas la possibilité de restreindre la circulation des personnes ou des véhicules dans des lieux et à des horaires déterminés.

J’ai ainsi rappelé ce matin par circulaire à tous les préfets qu’ils ont la possibilité d’instaurer un couvre-feu dans les secteurs de leurs départements de compétence qui leur paraîtraient exposés à des risques importants de troubles à l’ordre public.

Ils pourront également établir des périmètres de protection autour des bâtiments publics et d’édifices privés qui seraient susceptibles de faire l’objet de mena    ces.
Par ailleurs, l’état d’urgence implique également la possibilité d’interdire de séjour dans tout ou partie d’un département tout individu cherchant à entraver l’action des pouvoirs publics.

Les préfets pourront par ailleurs procéder à des réquisitions de personnes ou de biens si le maintien de l’ordre public le nécessite.

Dans les zones prévues par décret, Ils pourront aussi ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, débits de boisson, et divers lieux de réunions, ainsi qu’interdire toute manifestation de nature à représenter un risque pour les participants.

C’est ainsi qu’à Paris et dans les départements limitrophes, le Préfet de Police a pris la décision d’interdire toute manifestation sur la voie publique jusqu’à jeudi prochain. Une décision similaire a été prise par les préfets des départements de la grande couronne jusqu’à lundi.

La cellule Interministérielle de Crise siège depuis 21h00 hier soir à l’Hôtel de Beauvau, sans discontinuer. Un état-major opérationnel, se réunit deux fois par jour dans le salon Fumoir pour piloter l’ensemble du dispositif relevant de la compétence du ministère de l’Intérieur.

Voilà donc pour l’état d’urgence.

En ce qui concerne maintenant le déploiement des forces de sécurité sur l’ensemble du territoire :

Je rappelle que dès hier soir, l’ensemble des services de police – RAID, DCPJ, CRS, DGSI et SCRT, UCLAT, et DDSP de la grande couronne, ont été mobilisés en région parisienne. 5,5 compagnies de CRS supplémentaires ont été engagées en région parisienne.

Le niveau de mobilisation de l’ensemble des forces de police a été augmenté.

Le rétablissement des contrôles aux frontières est effectif depuis hier. Les 61 principaux points de passage autorisés font l’objet de contrôles particulièrement stricts des fonctionnaires de la police aux frontières et des services des douanes.  Les autres points de passage sont quant à eux contrôlés par les effectifs de la Direction Centrale de la Sécurité Publique, les compagnies de CRS déployées et la Gendarmerie Nationale. Nous avons pris l’attache de nos partenaires européens pour intensifier les contrôles des passagers voyageant vers la France en train ou par avion. Ils nous prêteront également leur concours pour le contrôle routier de nos frontières.

La DCSP assurera également le contrôle des gares RER, et la DCPAF celle des gares frontalières et des lignes transnationales, en coopération avec nos partenaires européens comme je l’ai indiqué à l’instant. Les ports font l’objet de mesures de sûreté particulière et les gares parisiennes internationales sont prises en compte par la Préfecture de Police.

Les axes routiers et notamment les autoroutes sont pris en charge par la DCSP et les CRS, et les aéroports par la DCPAF dans le cadre d’une sécurisation renforcée.

En ce qui concerne les effectifs de gendarmerie, 230 hommes en renfort ont été mis à la disposition de la Préfecture de Police. Deux sections du GIGN sont pré-positionnées. Le maillage de son réseau permet en outre à la gendarmerie d’opérer des contrôles efficaces dans la profondeur des territoires, à la périphérie des agglomérations, et sur les axes routiers. Ses unités assurent également la surveillance de sites sensibles.

Les armées ont dégagé 1000 militaires supplémentaires, essentiellement en Ile-de-France, qui patrouilleront dans Paris dans les prochains jours, comme l’a indiqué le Président de la République.

L’ensemble de ces renforts vient en appui des 30 000 policiers, gendarmes et militaires engagés depuis plusieurs mois à la protection de 5000 lieux sensibles sur l’ensemble du territoire, dans le cadre du plan Vigipirate.

Bien entendu, nos services de renseignement, dans le nouveau cadre juridique prévu par la loi antiterroriste du 13 novembre 2014 et la loi renseignement du 24 juillet dernier, sont totalement mobilisés pour mener la lutte contre les terroristes.

En termes de moyens de sécurité civile, 450 sapeurs-pompiers de Paris ont été mobilisés au cours de la nuit, et des renforts venus d’autres départements sont à disposition si nécessaire. L’ensemble des moyens spécialisés de la sécurité civile – effectifs issus de 28 centres de déminage, FORMISC,… - sont prêts à intervenir en cas de besoin. C’est notamment le cas de 15 000 personnels formés à la gestion des risques chimiques et de 5000 autres formés à la gestion des risques radiologiques.

Vous le voyez, toutes nos forces de sécurité sont mobilisées dans le combat décisif qui nous attend, et elles ont le soutien de la nation toute entière.