Au chevet de l'hôpital

Au chevet de l'hôpital © MI/Pref 58

Brigadier-chef à la DDSP de Nevers, Régis W. a organisé de mars à juillet 2012, plusieurs séances d'information et de formation à l'hôpital Pierre-Bérégovoy de Nevers, sur la gestion de l'agressivité et de la violence.


Les formations étant prévues au départ pour les personnels des urgences, Régis W. était parti pour animer trois ou quatre séances à l'hôpital Pierre-Bérégovoy de Nevers. Le policier en dispensera finalement dix, pour une centaine de personnes au total. "Il était prévu que je m'adresse aux médecins, internes, infirmiers, aides-soignants et agents d'accueil des urgences, mais certains personnels d'autres services comme la maternité par exemple, ont souhaité assister à ces sessions."

C'est à la demande du directeur départemental de la sécurité publique que le brigadier-chef a monté ces séances. "Les responsables de l'hôpital lui avaient fait part des difficultés des personnels face à la recrudescence de comportements violents, non seulement verbaux mais également physiques, de certains patients ou des personnes les accompagnant. Le directeur m'avait demandé de réfléchir à une formation pour les aider à gérer ce problème." Chef du groupe de sécurité de proximité du commissariat de Nevers mais également moniteur en activité physique et professionnelle, et fort d'une expérience de formateur en école de police, Régis W. était la personne idoine pour mettre en place et animer ces formations.

La première mesure que prit le policier fut de collecter un maximum d'informations auprès des personnels de santé sur la situation aux urgences. "Plusieurs facteurs expliquent cette augmentation des incidents. Premièrement, les patients ne supportent plus d'attendre et souhaitent être pris en charge dès leur arrivée. Certains ne veulent pas comprendre que leur cas peut être moins urgent que celui d'autres personnes. Ils sont persuadés que le service gère les dossiers des patients comme un cabinet de médecine classique". À cela s'ajoute le fait que les urgences sont souvent saturées, en raison de la disparition de médecins dans certaines zones rurales : "Les urgences sont alors considérées comme des cabinets de consultation, sans qu'il y ait forcément ce caractère d'urgence." Les contraintes budgétaires de la fonction publique hospitalière ont également eu un impact sur les effectifs et accru les difficultés du service.

Fort de ce diagnostic et de sa propre expérience, le policier a mis en place des sessions de trois heures proposant une approche à la fois théorique et pratique de la question. "La première partie portait sur l'analyse comportementale des personnes potentiellement violentes. Je leur ai donné des indications pour reconnaître les signes précurseurs d'une montée de la tension, et les moyens de désamorcer toute crise potentielle. Et il suffit parfois de prendre le temps de discuter, d'expliquer la situation au patient pour faire baisser la pression. Bien souvent, les personnels ne pensent pas informer les patients qui, attendant parfois des heures en salle d'attente, ont l'impression d'être abandonnés. Il peut également arriver que certains patients aient le sentiment que les médecins et les infirmiers les prennent un peu de haut. Je leur ai conseillé de faire un maximum d'efforts pour établir un rapport d'égalité, de ne pas adopter une attitude de professionnel face à un élève. Il suffit de se positionner à côté de la personne et non plus en face, quand on discute avec lui. D'autres patients font parfois une fixation sur un médecin ou un infirmier et ne supportent plus les rapports avec cette personne. Dans ce cas, il est souhaitable de changer d'interlocuteur afin de changer le discours."

Régis W. a également insisté sur les conditions d'attente à l'hôpital : "Il serait judicieux de faire un effort afin de rendre les salles d'attente plus conviviales et moins austères. Ces détails ont également une importance."

Après avoir énuméré les différents moyens d'éviter une montée de la tension, Régis W. a bien sûr évoqué la gestion de la violence. "Je leur ai dans un premier temps rappelé que face à toute situation de violence, leur premier réflexe devait être de nous prévenir. Ensuite, je les ai mis en garde contre toute tentative d'intervenir seul face à la personne et de le faire dans un espace clos. Je leur ai également déconseillé de porter sur eux le moindre objet – y compris un stylo – pouvant être utilisé comme une arme par la personne."

Le policier leur a par ailleurs enseigné les techniques de base pour se protéger au mieux des coups portés par la personne, ou pour se dégager de son étreinte. "Je leur ai expliqué également comment il était important d'établir une stratégie à plusieurs avant toute tentative d'intervention pour maîtriser la personne." Souhaitant en apprendre un peu plus sur les techniques d'autodéfense, certains personnels ont évoqué la possibilité de venir au commissariat pour se perfectionner. "Je vais voir si c'est possible de mettre cela en place."

Les formations de Régis W. ont rencontré un succès certain auprès des personnels de l'hôpital, dépassant même le cadre d'un cours classique. "De nombreux débats se sont déroulés au cours des différentes séances, et sur certains aspects qui ne me concernaient pas comme l'organisation interne en cas de violence, les rapports avec les patients, les méthodes ou les problèmes d'effectifs aux urgences. J'ai l'impression que mes cours ont permis de libérer la parole."

Si pour le moment, aucune nouvelle formation n'est programmée, le succès de la formation de Régis W. laisse augurer d'un renouvellement de l'expérience. À suivre.