Jean-Christophe Parisot est le premier membre du corps préfectoral handicapé. Tétraplégique, il a surmonté sa déficience physique par des capacités intellectuelles hors-normes. Son livre, Préfet des autres, retrace son parcours unique.
"Pourquoi moi ? Adolescent, je ne savais rien de la vie. Pourquoi fallait-il qu'elle s'arrête si vite alors qu'elle commençait à peine ? Je ne croyais pas à la mort. Celle du corps, peut-être, mais pas celle de l'âme ! J'avais trop envie de vivre." Dès les premières lignes de son livre autobiographique, Préfet des autres, Jean-Christophe Parisot révèle le secret de sa réussite : la rage de vivre. Atteint d'une maladie évolutive, l'alpha-sarcoglynopathie, il perd progressivement l'usage de ses membres, emprisonné dans un corps à un âge où on croque la vie avec énergie. Rythmée par les visites médicales incessantes, les séjours en centres spécialisés d'un autre temps, les réactions et les regards des autres, sa jeunesse fut une épreuve de force, physique mais surtout psychologique. Puis, à l'âge de 14 ans, il décide de prendre le taureau par les cornes : "Il était exclu que je subisse toute ma vie l'état d'inutilité auquel ma maladie semblait me condamner. Je voulais servir à quelque chose."
Dès lors, il va s'évertuer à ouvrir la voie/voix aux citoyens handicapés. Il crée, durant ses études à Sciences-Po Paris, la Ligue nationale des étudiants handicapés (LNEH) avec une cinquantaine d'étudiants de Nanterre, Dauphine et Orsay, et rédige le "Manifeste des citoyens handicapés", première pierre de son édifice pour briser le tabou de la normalité. En 1989, il se marie et devient le premier diplômé handicapé de Sciences-Po.
En 1991 naît le premier de ses quatre enfants. Il décide alors de se lancer à corps perdu dans la problématique du handicap, avec l'objectif de voir la promulgation d'une loi sur le handicap et l'autonomie des personnes, handicapées ou non, pour changer les mentalités et les regards sur ces populations "différentes". "Nègre" du député Gilles de Robien, Jean-Christophe Parisot prend le parti de défendre sa cause par les urnes. Président du collectif des démocrates handicapés, il se présente, sans moyens, aux élections présidentielles de 2002 et 2007 (avec trente-huit parrainages de maires), "l'occasion d'avoir une tribune", et aux sénatoriales de 2004, où il fera un score de 3,3 %. Mais son combat est freiné par cette maladie qui ne cesse de le ronger. En 2005, il frôle la mort, tandis que la loi sur le handicap est votée. Une fois de plus, il lutte et surmonte les obstacles. Il devient administrateur civil au ministère de l'Éducation nationale.
Le 10 juillet 2008, il devient officiellement secrétaire général de la préfecture du Lot et prend ses fonctions le 1er septembre à Cahors. Durant vingt-six mois, il se consacre à sa fonction, rythmée par l'expérimentation de la nouvelle organisation des services de l'État (OSE), la rencontre avec les élus locaux, les "montagnes de parapheurs", ou encore l'intercommunalité. En bref, "une aventure extraordinaire."
En 2010, il devient sous-préfet hors classe, chargé de mission à la cohésion sociale et à l'égalité des chances pour le Languedoc-Roussillon. Il devient alors le "préfet des autres" – une expression utilisée par les détenus qu'il visite –, celui qui s'investit non seulement pour les exclus physiques, mais aussi pour ceux qui sont rejetés pour leur origine, leur couleur de peau ou la maigreur de leur porte-monnaie. Il consacre soixante heures hebdomadaires à sa fonction, sans compter les interminables séances d'habillage, de soins et de kiné. Il a révolutionné les méthodes de travail de sa préfecture, dématérialisant l'intégralité de ses documents. Ne pouvant prendre des notes, le sous-préfet a la capacité de mémoriser l'intégralité de vingt-cinq dossiers à la suite et de les restituer oralement ensuite à son préfet en réunion du soir. "On développe des talents extraordinaires lorsque l'on est confronté à l'obligation de les développer. Cela peut paraître incroyable que de piloter des centaines d'agents sans bras et sans jambes. Personne ne doit se sentir impuissant face aux difficultés. Tout est possible !"
Jean-Christophe Parisot a été nommé, en conseil des ministres du 15 février, préfet hors cadre chargé d'une mission de service public relevant du Gouvernement à compter du 1er mars 2012.