Feux de forêt, la campagne 2012 - La Sécurité civile en rangs serrés

© Alban Jimenez

Comme chaque année, les sauveteurs de la Sécurité civile ont profité de l'hiver pour parfaire leur entraînement. L'anticipation et la complémentarité des moyens terrestres et aériens demeurent la clé d'un dispositif basé sur l'attaque des feux naissants.


À l'heure où Bison Futé voit rouge, les équipages de bombardiers d'eau sont dans les starting-blocks. Pour la grande majorité des sauveteurs de la Sécurité civile, la saison estivale rime avec travail. À partir de la mi-juin, les pompiers du ciel vivent pendant quatre mois au rythme des feux.

"Un jour sur trois, nous sommes d'astreinte à la base de Marignane. Le lendemain, nous sommes d'alerte à 1 heure puis nous prenons un jour de repos. Sur base, nous sommes présents du lever au coucher du soleil. Nous avons 30 minutes pour aller sur un feu et nous pouvons voler jusqu'à 8 heures par jour", raconte Olivier Lechevalier, le chef du secteur Canadair. Depuis vingt et un ans, il passe ses étés à éteindre des feux quand d'autres goûtent aux joies du camping. "Avec ce régime de travail en tiers, on perd la notion de la semaine et on doit s'astreindre à une hygiène de vie particulière. Notre mission est d'être prêt au départ. La lutte contre le feu en est l'aboutissement."

Comme tous les sauveteurs, les équipages des bombardiers d'eau alternent les moments de calme plat et d'activité intense. Une vie choisie et assumée, au rythme des saisons et des catastrophes. L'hiver, les avions font l'objet d'une révision complète pour garantir une disponibilité opérationnelle supérieure à 90 % pendant la saison des feux. "Dès la fin janvier, nous reprenons l'entraînement sur cible pour être prêts en mai. Cette période est plus calme et nous permet de repasser nos qualifications et des formations avec les sapeurs-pompiers. On apprend à se connaître et à travailler ensemble avant le coup de feu de l'été" explique Philippe Prioult, le patron des équipages des Tracker, ces aéronefs rouge et blanc qui viennent de fêter leurs trente ans de service.

Dès février, les équipages ont repris l'alerte et, cette année, ils n'ont pas chômé. "L'hiver et le début du printemps ont été secs. 2 000 hectares sont partis en fumée, un record depuis dix ans, et deux sapeurspompiers sont décédés en Ardèche", rappelle Philippe Michaut, spécialiste des feux de forêt à la direction générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC). "Les pluies du printemps ont gorgé les végétaux, sauf entre le Var et l'Aude, où la sécheresse est plus importante que la normale, mais cette situation est totalement réversible."

Quoi qu'il arrive cet été, le dispositif de lutte contre les feux de forêt mis en place par la Sécurité civile depuis la fin des années 1980 est immuable. C'est une savante alchimie entre les sapeurs-pompiers territoriaux et les moyens de lutte nationaux, terrestres et aériens. Cette année, le ministère de l'Intérieur engage six cents sapeurs des formations militaires de la Sécurité civile et toute sa flotte de bombardiers d'eau aux côtés des sapeurs-pompiers avec deux mots
d'ordre, l'anticipation et l'attaque des feux naissants.

Dès que les bulletins d'alerte météo virent au rouge, les hommes au sol se positionnent au plus près des zones sensibles et les Tracker décollent pour effectuer des missions de guet aérien armé. À la moindre fumée, les avions ont dix minutes pour être sur zone et moucher le feu avant qu'il ne gagne du terrain car "les petits feux, on sait toujours les éteindre". Lorsque la situation dégénère, les soldats du feu s'appuient sur la force de frappe des Canadair. En 11 secondes, ces avions amphibie écopent six tonnes d'eau et cognent le front de flammes pendant que des avions Dash posent des lignes d'un produit retardant sur des centaines de mètres. De quoi ralentir l'avancée du feu et permettre aux hommes au sol de le circonscrire. Ce balai aérien est coordonné par des Beech, de petits avions de coordination et de commandement qui ont toute leur place dans cette mobilisation concertée de moyens terrestres et aériens auxquels les hélicoptères de la Sécurité civile viennent se joindre pour guider les bombardiers d'eau. "Les conditions de mise en oeuvre d'un dispositif comptent autant que les moyens eux-mêmes et permettent de réduire sensiblement l'impact des feux de forêt sur la végétation, assure Philippe Michaut. En France, 95 % des incendies parcourent moins de cinq hectares".