Organisé en décembre dernier par l'office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS) de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), le séminaire "European Drugs Profiling System" (EDPS) a réuni magistrats et experts européens pour des échanges sur le thème du profilage des drogues.
Dans son dernier rapport publié en 2011, l'organe international de contrôle des stupéfiants (OICS)[chargé de contrôler le respect des conventions de l’ONU (Organisation des Nations unies), en date de 1961, 1971 et 1998, réglementant les stupéfiants et leurs précurseurs] a classé les drogues synthétiques au deuxième rang des produits stupéfiants les plus consommés dans le monde, après le cannabis. Une problématique que l'Union européenne a décidé d'affronter via son plan antidrogue 2005-2012 et le lancement en 2009 du projet "European Drugs Profiling System" (EDPS), qui vise à trouver une solution, à long terme, pour le profilage scientifique des drogues de synthèse. Coordonné par les Pays-Bas, EDPS réunit les laboratoires de police scientifique et les services opérationnels belges, britanniques, finlandais, français, suédois, suisses et Europol. Tous ces acteurs, mais aussi des représentants de la MILDT, (mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie – France), sept magistrats français, dont un de la DACG (direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice – France) et un néerlandais, ont participé à une réunion au ministère de l'Intérieur (France) du 12 au 14 décembre 2011, pour faire un point de situation dix-huit mois après le lancement du projet. Pour Noud de Bruin, pilote néerlandais du projet, "cette structure nous pousse à acquérir une vision globale et coordonnée des affaires et des saisies de drogues de synthèse. Grâce aux différents points de contact présents dans toute l'Europe, de nombreux échanges entre experts permettent d'établir des liens entre des saisies sur le continent et de fournir ainsi des éléments de preuves aux magistrats."
Un des outils utilisés est tenu par Europol : la base PIC d'Europol. Englobant de nombreuses données, elle permet ainsi d'informer en temps réel les états membres du réseau. "Elle comprend 15 000 photos de substances diverses, répertorie des techniques de production de drogues de synthèse, ou encore près de 600 symboles représentés sur les cachets d'ecstasy, explique Werner Verbruggen, membre d'Europol.
Grâce à ces données provenant des services opérationnels du monde entier, nous pouvons constater, par exemple, qu'un même type de machine est utilisé en Europe, en Asie, en Amérique du Sud et en Amérique du Nord, et arrêter ensuite directement son fabricant." Bruno Balduc, référent français d'EDPS au sein de l'OCRTIS, a présenté la situation en France : "Nous constatons ces derniers mois une recrudescence des saisies. Alors qu'en 2010 176 kg d'amphétamines et près de 600 000 comprimés d'ecstasy ont été saisis, nous sommes passés à 565 kg d'amphétamines et plus de 1 million de comprimés d'ecstasy en 2011. En un an, la France a identifié 26 liens chimiques [recoupements] entre des échantillons provenant des saisies en France et dans les pays partenaires [Allemagne, Finlande, Pays-Bas, et Royaume-Uni]."
Un procureur et trois juges d'instruction de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Lille étaient également invités à ce séminaire, et selon Richard Foltzer, juge d'instruction à Lille : "Notre JIRS est située sur un passage entre la Belgique et les Pays-Bas d'une part, et le Royaume-Uni d'autre part. Nous sommes donc amenés à traiter les plus grosses affaires de saisies en France, souligne Richard Foltzer, juge d'instruction lillois. Nous avons acquis une expérience en la matière et avons été parmi les premiers magistrats formés à cette technique de profilage de drogues de synthèse et d'amphétamines. Nous sommes en demande de tout ce qui nous permet de faire des liens à un très haut niveau de trafic. EDPS s'annonce donc comme un outil très important pour l'avenir, à condition que tous les pays se montrent réactifs en partageant leurs informations dès que le besoin s'en fait sentir."