L'année 2015 présente un bilan contrasté : la mortalité routière est en hausse de 2,4%, le nombre d'accidents corporels a baissé de 3,6%, tout comme celui des personnes blessées (-3,6% également) et des hospitalisations (-1,8%).
Selon les estimations de l'ONISR (Observatoire national interministériel de la sécurité routière), les résultats définitifs devant être connus fin mai, 3 464 personnes auraient perdu la vie sur les routes de France en 2015, soit 80 décès supplémentaires par rapport à 2014.
Les résultats du mois de décembre 2015 n'ont malheureusement pas permis d'inverser la tendance. 308 personnes y ont trouvé la mort sur les routes, soit une hausse de 7,7%. Les autres indicateurs de l'accidentalité routière sont également en augmentation : + 1,7% d'accidents corporels, + 0,7% de personnes blessées et + 4,3% d'hospitalisations.
En 2015 comparé à l'année 2014, les accidents corporels ont été moins nombreux : 56 109 contre 58 191 en 2014, soit une diminution de 3,6% (-2 082 accidents corporels). Après une hausse en 2014, les résultats 2015 s'avèrent meilleurs qu'en 2013 (-703 accidents, soit -1,25% entre 2013 et 2015). Les séries de mesures prises depuis un an par le gouvernement y ont nécessairement fortement contribué.
Le nombre de personnes blessées enregistre la même diminution : 70 442 en 2015 contre 73 048 en 2014, soit également une baisse de 3,6%, et 2 606 personnes blessées de moins. Le nombre de personnes admises dans un centre hospitalier après un accident de la route est lui aussi en recul : 26 143 contre 26 635 en 2014, soit 492 personnes hospitalisées en moins (-1,8%). Les chiffres définitifs permettront de savoir si cette constatation se confirme pour la comparaison avec 2013.
Un nombre d'accidents en baisse mais avec un bilan mortel en hausse signifie que plusieurs de ces accidents ont été particulièrement violents et meurtriers, comme celui de Puisseguin en Gironde où 43 femmes, hommes et un enfant ont péri le 23 octobre 2015, à la suite de la collision entre un poids lourd et un autocar.
La hausse de la mortalité enregistrée l'an passé concerne principalement les automobilistes : l'ONISR dénombre 135 décès supplémentaires dans cette catégorie d'usagers, soit une hausse de 8%.
La mortalité des conducteurs de poids lourds et leurs passagers est relativement stable avec 58 décès en 2015. Cette réalité ne doit cependant pas faire oublier que 14% des personnes tuées sur la route le sont dans un accident impliquant un poids lourd.
La mortalité motocycliste s'élève en 2015 à 619 décès. Elle est quasiment stable (- 1%) par rapport à l'an passé. Un mois de juillet très beau, donc accidentogène, a contrasté avec un mois de septembre, particulièrement pluvieux et orageux, pendant lequel la pratique moto a été réduite.
Les autres usagers vulnérables ont vu leur accidentalité en nette diminution: - 5% pour celle des cyclistes (151 décès), - 7% pour celle des piétons (463 décès) et - 10% pour celle des cyclomotoristes (149 décès).
Quoiqu'il en soit, ces usagers vulnérables représentent toujours 40% des personnes tuées et 70% des personnes grièvement blessées alors que leur proportion dans le trafic est très faible.
L'accidentalité routière reste invariablement un phénomène très masculin : pour des distances parcourues à peu près équivalentes entre hommes et femmes, les trois-quarts des victimes de la route sont des hommes.
L'analyse de l'ONISR met en évidence que la mortalité des jeunes de 18-24 ans, qui avait fortement baissé en 2014 (- 8,5%) repart à la hausse en 2015 (+ 7%). En 2015, 622 jeunes hommes et jeunes filles ont perdu la vie sur les routes. Les 15-29 ans, soit 18% de la population, représentent 22% des personnes tuées et un tiers des personnes grièvement blessées sur les routes. Un décès sur cinq se produit lors d'un accident impliquant un conducteur novice. L'accident de la route reste malheureusement toujours la première cause de mortalité chez les jeunes.
La mortalité des personnes de plus de 65 ans augmente fortement en 2015 (840 personnes décédées soit + 9%). L'accident de Puisseguin ne suffit pas à expliquer l'ensemble de la sur-mortalité des seniors également particulièrement touchés en tant qu'automobilistes (+ 66 personnes tuées sur les 10 premiers mois de 2015).
Sur les trois premiers trimestres de 2015, il est recensé une augmentation de 2,5% du trafic sur les routes nationales et le réseau autoroutier. En effet, les chiffres de l'accidentalité routière sont à mettre en regard de phénomènes conjoncturels. Une baisse significative des coûts du carburant et un été, puis un début d'hiver, favorables aux trajets ont stimulé les déplacements. En outre, après les attentats du 13 novembre, beaucoup d'usagers ont privilégié un mode de transport individuel aux transports en commun. Le week-end de Noël, en dépit d'une très forte mobilisation des forces de l'ordre, a été particulièrement meurtrier, 28 décès contre 16 l'an passé, l'un des plus mauvais de ces dix dernières années.
Une augmentation des vitesses pratiquées est venue s'ajouter à la hausse de la fréquentation sur les routes. Selon l'ONISR, un quart des accidents mortels sur les 10 premiers mois de l'année 2015 ont pour cause principale la vitesse excessive ou inadaptée.
Dans son « observatoire des vitesses », l'ONISR constate un changement de comportement des usagers, après 10 années de diminution des vitesses moyennes enregistrées sur nos routes, grâce à l'implantation des radars. La trop grande connaissance par les automobilistes de l'emplacement des dispositifs de contrôle a manifestement atténué leur efficacité. La tendance à lever le pied s'est donc inversée depuis 2013 : les vitesses moyennes observées sont en augmentation de 1 à 4 km/h selon les réseaux.
Conséquence directe de cette augmentation des vitesses pour les autoroutes, on constate une très forte augmentation de la mortalité sur ce type de routes (déjà 50 personnes tuées supplémentaires sur les dix premiers mois de l'année, principalement des automobilistes et des motocyclistes).
La part des accidents mortels en présence du facteur alcool passe de 28% à 30% en 2015, cette augmentation s'expliquant par la prise en compte depuis le 1er juillet 2015 des conducteurs novices dont l'alcoolémie se situe entre 0,2 g/l et 0,5 g/l.
La part des accidents mortels en présence du facteur stupéfiants passe quant à elle de 23% à 25%. Après une stabilité sur plusieurs années, c'est la deuxième année consécutive d'augmentation. La moitié des conducteurs impliqués dans un accident mortel sous l'emprise de stupéfiants présentait également un taux d'alcool illégal.
Le non-port de la ceinture de sécurité s'affirme cette année encore comme une cause de mortalité qu'on pensait révolue, notamment en situation professionnelle. Il concerne 21% des décès à bord d'un véhicule léger, 27% à bord d'un véhicule utilitaire et 37% à bord d'un poids-lourd.
Ce constat vient conforter la pertinence du plan gouvernemental de 26 mesures en faveur de la sécurité routière présenté le 26 janvier 2015 par le ministre de l'Intérieur Bernard CAZENEUVE qui sont pratiquement toutes mises en œuvre. 55 mesures décidées par le Comité interministériel du 2 octobre 2015 présidé par le Premier ministre, et en particulier une refonte majeure de la stratégie radars, complètent et renforcent le dispositif en cours de l'année à venir.
Le ministre de l'Intérieur, Bernard CAZENEUVE, en appelle à la responsabilité individuelle de tous et de chacun : « Il y a donc moins d'accidents mais plus de morts. Cela veut dire qu'il y a moins de sens des responsabilités des automobilistes. Aussi la responsabilité collective devrait nous inciter, tous d'une même voix, à dire : l'Etat prend des précautions, il multiplie les contrôles mais rien ne peut se substituer à la responsabilité individuelle »