Ouverture de la journée de réflexion sur la prévention de la radicalisation

Ouverture de la Journée de réflexion sur la prévention de la radicalisation (c) SG - Dicom - P.Chabaud
12 novembre 2015

Discours de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur lors de l'ouverture de la Journée de réflexion sur la prévention de la radicalisation le jeudi 12 novembre 2015 - Hôtel de Beauvau


Seul le prononcé fait foi.

Mesdames et Messieurs les Préfets,
Monsieur le Préfet, Secrétaire général du Comité interministériel de Prévention de la radicalisation,
Mesdames et Messieurs les directeurs et représentants des services de l’Etat,
Mesdames et Messieurs les représentants des associations,
Mesdames et Messieurs,

Je veux tout d’abord vous souhaiter la bienvenue au ministère de l’Intérieur et vous remercier d’avoir accepté de participer à cette grande journée de réflexion consacrée à la prévention de la radicalisation.
C’est en effet la première réunion de ce type que nous organisons Place Beauvau, avec l’ensemble des acteurs concernés, les acteurs publics comme les acteurs associatifs.
Comme vous le savez, le Gouvernement a très tôt pris la mesure du phénomène inédit que constitue la radicalisation violente de centaines de nos concitoyens sur fond d’engagement djihadiste, et il s’est efforcé de lui apporter un ensemble de réponses coordonnées. L’événement qui nous rassemble aujourd’hui est donc d’abord l’occasion de dresser un premier bilan de ce qui a été accompli au cours des derniers mois, alors que la menace terroriste qui pèse sur notre pays demeure à un niveau très élevé.
Si nous agissons sans relâche pour entraver les actions terroristes et traquer leurs commanditaires, il est également nécessaire que nous intervenions en amont pour prévenir les phénomènes d’endoctrinement et de radicalisation qui peuvent conduire à un passage à l’acte violent. Car nous le savons bien : l’indispensable réponse sécuritaire n’est pas à elle seule suffisante.

Face à la menace que représentent les filières djihadistes, la prévention de la radicalisation constitue cependant un domaine d’intervention relativement récent – du moins en France. Il n’existait pas à l’époque où nous luttions contre les premières générations de terroristes djihadistes, liés au GIA et à al-Qaïda, qui présentaient des caractéristiques très différentes. Ce n’est que progressivement qu’est apparue la nécessité de comprendre le processus qui amène des groupes et des personnes à basculer dans l’action terroriste, afin de pouvoir agir en amont de ce basculement fatal.
La France n’est pas, du reste, le seul pays concerné. Le même phénomène se rencontre en effet dans la plupart des pays européens, mais aussi aux Etats-Unis, au Canada et en Australie, ce qui explique que, parmi les quelques 20 000 combattants étrangers présents aujourd’hui en Irak et en Syrie, l’on dénombre environ 5 000 Européens venus de France, d’Allemagne, de Belgique, du Royaume-Uni, du Suède ou d’Espagne. Chacun de ces pays a ainsi mis en place ses propres dispositifs de prévention de la radicalisation, et une approche comparatiste nous montre que nous ne sommes pas les moins avancés, loin de là, dans la réflexion sur le sujet, même si, bien entendu beaucoup reste à faire.
Dès le mois d’avril 2014, le Gouvernement a ainsi mis en place un plan de lutte contre la radicalisation violente et contre les filières djihadistes qui comprenait non seulement un renforcement de notre dispositif antiterroriste – que vous connaissez et sur lequel je ne reviens donc pas – mais aussi un important volet préventif. 

Cette action constitue une priorité absolue, non seulement parce que la sécurité des Français est en jeu, mais aussi parce que c’est le destin de nombreuses familles qui bascule lorsqu’elles sont frappées par la radicalisation d’un enfant ou d’un parent. Une famille dont un enfant part en Syrie est une famille brisée, rongée par la crainte, la culpabilité et le désarroi. N’oublions pas qu’à ce jour 141 personnes, souvent jeunes, ont perdu la vie après avoir rejoint les organisations terroristes sur le front irako-syrien.
Nous devons donc tout faire pour aider et accompagner ces familles désespérées, comme nous avons le devoir de tout entreprendre pour prévenir de telles dérives mortifères et pour sauver celles et ceux qui ont sombré dans le fanatisme et la radicalisation.
Les retours d’expérience des acteurs de terrain que vous êtes sont donc particulièrement précieux et doivent nous aider à améliorer l’efficacité globale de notre dispositif. C’est là l’objectif de cette journée qui nous rassemble au ministère de l’Intérieur.

Pour lutter efficacement contre le phénomène de la radicalisation violente, nous devons d’abord faire en sorte d’en connaître les ressorts et les motivations, les étapes et les processus qui y conduisent certains de nos concitoyens.
Nous savons désormais que la menace à laquelle nous sommes confrontés a changé de nature. Longtemps, nous avons dû faire face à des cellules terroristes étanches qui le plus souvent venaient de l’étranger pour commettre des attentats sur notre sol avant de s’en retourner dans leur pays d’origine. Or, aujourd’hui, nous constatons que le risque provient de personnes qui sont nées ou qui ont grandi parmi nous et qui, au terme d’un processus de radicalisation, tombent dans le fanatisme et la violence armée. Parmi elles, beaucoup rejoignent les organisations terroristes présentes en Syrie et en Irak – 571 de nos concitoyens sont ainsi actuellement dans cette situation. Une fois endoctrinés et entraînés à tuer par DAESH et le Front al-Nosra, branche locale d’al-Qaïda, la plupart d’entre eux représenteront un risque sécuritaire majeur à leur retour. Pas moins de 246 personnes parties sur le théâtre des opérations sont d’ores et déjà revenues en France.
Il est donc essentiel que nous connaissions de façon aussi précise que possible la composition et les évolutions de cette population, ce qui ne va pas sans difficultés en raison de la grande variété des profils des personnes radicalisées ou en voie de radicalisation.

Que constatons-nous ? Certaines de ces personnes sont des délinquants de droit commun qui ont notamment pu se radicaliser au cours d’un séjour en prison ou au contact d’activistes islamistes aguerris. D’autres sont des jeunes issus des milieux populaires qui se trouvent en situation d’échec social et de fragilité psychologique, animés par un sentiment de frustration et parfois de haine à l’égard de la société où ils ont grandi et dont ils se sentent rejetés en raison de leurs origines. Un goût pour les théories du complot véhiculées sur Internet, mais aussi le sentiment que les musulmans, où qu’ils se trouvent, sont menacés ou maltraités, peuvent également jouer un rôle dans le processus de radicalisation.

Mais d’autres encore, qui ne semblent pas – du moins en apparence – en butte à des problèmes d’insertion dans la société et qui sont souvent issus des classes dites moyennes ou supérieures, se disent « en quête de sens » et pensent trouver une réponse et une issue à leur malaise identitaire dans un islam dévoyé. Leur engagement peut dès lors traduire, d’une façon extrême, une ambition de participer à un changement radical du monde dans lequel ils vivent et qui ne les satisfait pas. Certains d’entre eux développent ainsi une conception fantasmée de la « révolution islamiste », nourrie par la propagande habile que DAESH diffuse sur Internet et sur les réseaux sociaux.

C’est dans cette troisième catégorie que l’on rencontre le plus grand nombre de convertis de fraîche date – qui d’une manière générale sont nombreux parmi les personnes radicalisées. Leur culture religieuse est sommaire et même, la plupart du temps, inexistante. Les filières djihadistes cherchent tout particulièrement à recruter ces convertis parce qu’ils connaissent la culture occidentale de l’intérieur et qu’ils permettent de nourrir leur propagande. C’est notamment ainsi qu’il faut comprendre la mise en scène de criminels à visage découvert, soigneusement choisis parmi toutes les nationalités présentes sur le théâtre des opérations, pour figurer dans certaines vidéos macabres d’exécutions de masse.
Nous constatons également que, parmi les personnes radicalisées, nombreux sont les mineurs, des adolescents parfois en rupture avec leur milieu familial, parfois au contraire ne laissant rien soupçonner à leur entourage de la crise qu’ils traversent. Il s’agit là d’un véritable changement par rapport aux djihadistes des générations précédentes. Parmi les personnes radicalisées que nous avons identifiées, 16 % ont en effet moins de 18 ans, et 85 de ces mineurs ont même rejoint les organisations terroristes en Irak ou en Syrie.

Enfin, un quart des personnes radicalisées identifiées sont des femmes, et 199 d’entre elles sont actuellement présentes dans la zone irako-syrienne. Certaines sont attirées par un argumentaire humanitaire fallacieux mettant en avant la nécessité d’aider les enfants victimes des crimes – hélas bien réels – du régime de Bachar EL-ASSAD. D’autres accompagnent ou cherchent à rejoindre leur compagnon engagé aux côtés des djihadistes, quand elles ne sont pas virtuellement mariées à distance, puis attirées sur place pour finir enfermées et maltraitées, parfois même réduites en esclavage sexuel.
Aux motivations d’ordre social (le ressentiment, la quête de l’aventure) ou bien idéologique, il faut également ajouter des facteurs d’ordre psychologique, voire psychiatrique, que nous ne saurions non plus négliger. A ce jour, en effet, 103 personnes que nous avons identifiées comme radicalisées ou étant sur la voie de la radicalisation font l’objet d’un suivi médical, 62 ayant même dû être hospitalisées.

En définitive et quelles que soient leurs motivations propres, toutes les personnes concernées sont la proie de prosélytes d’autant plus actifs qu’ils décèlent des fragilités chez celles et ceux qu’ils manipulent. Elles se retrouvent ainsi victimes d’un véritable embrigadement qui n’a d’autre objectif que de réduire autant que faire se peut la part d’humanité et d’individualité qui leur est propre pour mieux obtenir d’elles une obéissance totale au groupe auquel elles adhèrent.
Il est donc important que, pour chaque personne considérée, nous ne nous trompions point de diagnostic. Cette population d’environ 2 000 individus, dont le nombre va croissant, représente globalement, comme je l’ai dit, un risque sécuritaire majeur. Pour autant, elle ne constitue pas à proprement parler un phénomène « de société » et encore moins un courant, même marginal, de l’islam de France, dont je rappelle que tous les responsables ont au contraire condamné avec la plus grande fermeté les crimes de DAESH, soulignant que les musulmans en sont les premières victimes.
Nous connaissons donc aujourd’hui beaucoup mieux qu’auparavant le phénomène de la radicalisation violente dans toute sa complexité. Nous sommes également capables d’en identifier plus aisément les symptômes et de détecter une trajectoire de radicalisation.
Depuis le mois d’avril 2014, nous avons ainsi mis en place plusieurs outils qui nous permettent de gagner en efficacité dans le travail de repérage des personnes concernées.
Nous avons d’abord élaboré une grille d’indicateurs du basculement dans le fanatisme et la radicalisation violente. Ce référentiel est le fruit d’un travail scientifique particulièrement rigoureux, conduit notamment par le Secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance (CIPD), l’Unité de coordination de la lutte anti-terroriste (UCLAT), la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), la Direction de l’administration pénitentiaire, l’Education nationale, en étroite collaboration avec la Fédération française de psychiatrie.
A cet égard, je veux saluer la grande qualité du travail réalisé par les uns et les autres, et remercier chaleureusement le préfet Pierre N’GAHANE, qui l’a coordonné, ainsi que l’ensemble des équipes du Secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance, qui ont largement contribué à concevoir et à mettre en œuvre notre politique de prévention de la radicalisation violente.
Adressée dès le 17 septembre dernier aux services déconcentrés de l’Etat sur l’ensemble du territoire national, notre grille d’indicateurs de basculement permet d’identifier aussi bien les « signaux forts » que les « signaux faibles » révélant une dérive fanatique, de telle sorte que nous pouvons établir un diagnostic et proposer une prise en charge adaptée à chaque cas.

Il est donc absolument indispensable que toute personne dont on est certain, ou bien dont on craint qu’elle n’ait basculé dans la radicalité, soit signalée aux structures compétentes. L’ensemble des acteurs publics et des acteurs associatifs qui travaillent auprès des jeunes doivent participer à cette tâche d’identification et de prise en charge des personnes concernées. En effet, tout phénomène de radicalisation qui ne serait pas repéré ni suivi par un service spécialisé, quel qu’il soit – renseignement, services sociaux, aide psychologique –, constitue une menace pour la personne concernée et pour la société, une menace susceptible de préfigurer un basculement dans une violence extrême.

Pour renforcer nos procédures de signalement, nous avons ainsi créé un dispositif reposant sur une architecture claire.
Tout d’abord, voici plus d’un an et demi, nous avons mis en place une structure spécifique, le Centre national d’assistance et de prévention de la radicalisation. Avec l’aide de l’UCLAT, qui a mobilisé toute son expertise, nous lui avons adossé une plateforme téléphonique nationale regroupant une équipe de professionnels formés à écouter, rassurer et orienter les familles confrontées au phénomène de la radicalisation. Ces dernières bénéficient ainsi d’un soutien précieux et peuvent signaler les risques de départ en Syrie ou en Irak quand l’un de leurs proches est sur le point de quitter le territoire. Cette plateforme a désormais atteint sa pleine maturité opérationnelle. A ce jour, 3 800 signalements pertinents, très exactement, ont été ainsi recensés par le Centre national. Ce dispositif, à la fois simple et inédit, s’est donc révélé particulièrement efficace.

Ensuite, chaque signalement est communiqué au préfet concerné en fonction du lieu de résidence de la personne signalée afin que nous puissions la prendre en charge. Dans chaque département, nous avons en effet mis en place une « cellule de suivi et de prévention de la radicalisation », pilotée par le préfet et le procureur de la République. Ces cellules réunissent l’ensemble des services de l’Etat concernés – protection judiciaire de la jeunesse, Education nationale, services sociaux, autres services –, ainsi que leurs partenaires, parmi lesquels les collectivités locales et les acteurs associatifs jouent un rôle déterminant. Elles prennent en charge les personnes radicalisées ou en cours de radicalisation, leur proposant des protocoles de désengagement et des dispositifs de réinsertion individualisée. La pleine coopération de tous les acteurs mobilisés est évidemment la clé de l’efficacité.
L’objectif poursuivi par ces cellules de suivi est de collecter l’ensemble des signalements qui concernent leur département. Par là même, chacune d’entre elles constitue, sur son ressort territorial, la seule et unique structure qui soit en mesure de dresser un diagnostic de radicalisation et de désigner le service compétent censé intervenir.

Enfin, en juin dernier, nous avons créé un Etat-major opérationnel de prévention du terrorisme (EMOPT) dont le rôle est de coordonner, d’animer et de contrôler à l’échelon central le suivi des personnes radicalisées pour s’assurer que celui-ci est bien effectif.  Pour ce faire, l’EMOPT réunit désormais des représentants de tous les services impliqués dans la lutte contre le terrorisme, qui organisent le partage de l’information et le travail en commun. Son rôle est donc complémentaire de celui de l’UCLAT, qui participe à cet état-major, et qui développe par ailleurs l’expertise indispensable à la compréhension de la radicalisation.
De son côté, l’EMOPT, dont j’ai confié le pilotage au préfet Olivier DE MAZIÈRES et qui est directement rattaché à mon cabinet, centralise les informations collectées, s’assurant ainsi de leur fiabilité et de leur exhaustivité.  Les préfets disposent ainsi, avec l’EMOPT, d’un interlocuteur vers lequel ils peuvent se tourner pour orienter leur propre action sur le terrain.
Je n’entends donc pas – vous l’aurez compris – que l’on se limite à une approche purement chiffrée et statistique de la radicalisation. Compte tenu des menaces qui pèsent sur notre pays, nous devons sans cesse actualiser nos connaissances des phénomènes en question. Avec le CIPD, le Centre national d’assistance et de prévention de la radicalisation, avec l’UCLAT, avec les cellules départementales de suivi et avec l’EMOPT, nous disposons d’un dispositif qui est à mes yeux clairement structuré autour de correspondants bien identifiés et d’une feuille de route partagée par tous les services concernés, au plan national comme à l’échelon territorial.
Bien entendu, aussi nécessaire soit-il, le suivi des cas de radicalisation par les services spécialisés de l’Etat ne constitue pas la totalité de notre réponse. Au titre du Fonds interministériel de prévention de la délinquance, 6 millions d’euros sont ainsi actuellement consacrés au suivi de 1 213 jeunes radicalisés et à l’accompagnement de 620 autres.

Par ailleurs, nous avons mis en place, en mai dernier, une équipe mobile d’intervention. Pilotée par Dounia BOUZAR, que je salue, cette équipe intervient directement sur le terrain à la demande des préfets pour traiter les situations individuelles les plus difficiles. Partout où elle est mobilisée, elle prépare et assure un transfert de compétences aux acteurs locaux pour qu’après son départ l’action entreprise puisse se poursuivre. A ce jour, grâce à une méthode innovante, elle a déjà pris en charge une cinquantaine de personnes dont elle continue d’assurer le suivi attentif après les avoir détournées de la logique de radicalisation dans laquelle elles s’étaient enfermées.
Parallèlement, nous nous efforçons d’élaborer un contre-discours efficace qui insiste sur la réalité des actes barbares commis par DAESH pour contrer les mensonges de la propagande diffusée par ce type d’organisation terroriste. C’est l’objet du travail entrepris par le Service d’information du gouvernement, en coordination avec différents acteurs scientifiques et spécialisés.

Le rôle et les capacités de chacun sont donc parfaitement identifiés, ainsi que les complémentarités et les relais existant entre les différents acteurs de l’Etat, les collectivités territoriales et les acteurs du milieu associatif.
Face au phénomène de la radicalisation, nous avons donc agi sans tarder et nous avons collectivement mobilisé des moyens importants pour faire obstacle à la politique de recrutement criminelle engagée par DAESH. Nous avons ainsi collectivement pu empêcher de nombreux départs vers la Syrie et l’Irak, puisque près de 200 interdictions de sorties du territoire ont été prononcées et que bien d’autres candidats potentiels au départ ont pu être détournés de leurs projets après avoir été pris en charge dans le cadre de notre dispositif.
La tâche est lourde et complexe. Elle appelle pour chacun d’entre nous l’obligation de maintenir notre effort, d’examiner lucidement ses résultats et de chercher ensemble toutes les voies de progression.

Deux rapports parlementaires, conduits par les députés Sébastien PIETRASANTA et Malek BOUTIH, sont venus nourrir ce premier bilan. Une mission associant les inspections des ministères de la Justice, de l’Education nationale et de l’Intérieur rendra par ailleurs ses observations au mois de décembre.
Dresser le bilan, dégager des marges de progression : c’est là l’objet de cette journée de réflexion à laquelle vous avez accepté de prêter votre concours. J’attends beaucoup de ses résultats et je me félicite de pouvoir écouter en fin de journée la restitution des travaux des différents ateliers auxquels vous participerez. Ceux-ci vous amèneront en effet à aborder les aspects cruciaux d’une politique de prévention, qu’il s’agisse du travail si important que vous poursuivez avec les familles, des aspects psychologiques et cliniques du désengagement de la personne radicalisée, ou encore de l’implication des travailleurs sociaux dans l’accompagnement de ceux qui renoncent à leur projet et souhaitent retrouver une place dans la société.
Chacun de ces aspects est essentiel et doit faire appel à des expertises différentes. Mais il n’est pas moins essentiel de parvenir à réunir ceux qui possèdent de telles expertise et à les faire travailler ensemble, afin d’assurer de façon cohérente un suivi efficace des personnes radicalisées. C’est là l’objet d’un quatrième atelier et il me semble particulièrement important.

Je suis en effet convaincu, comme les autres membres du Gouvernement, que la lutte contre la radicalisation, en raison de sa complexité,  doit être menée en rassemblant les expertises et les expériences de nombreux départements ministériels, ainsi que celles des associations et des collectivités locales. Cette exigence résulte des caractéristiques intrinsèques de ce phénomène, de la diversité des individus qui y succombent comme des causes qui les font succomber.
C’est pourquoi je me félicite de ce que cinq ministres aient tenu à se trouver à nos côtés, à la fin de cette journée, pour assister à la restitution de vos travaux : la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, la ministre de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur, la ministre du Travail et de la Formation professionnelle, le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports et la secrétaire d’Etat en charge de la Famille.

J’aurai l’occasion de les remercier personnellement ce soir de leur présence, mais je voudrais d’ores et déjà souligner qu’elle témoigne du caractère global de la démarche que nous avons décidé d’adopter face au phénomène de radicalisation
Je sais donc pouvoir compter sur votre concours, votre énergie, vos compétences, vos expériences et votre réflexion.

Car, en définitive, la prévention de la radicalisation est un combat qui nous oblige tous. C’est le combat par excellence de la République qui défend ses valeurs tout en protégeant ses enfants. C’est un combat légitime, parce qu’il n’est pas tourné contre une religion, ni contre une catégorie de citoyens, mais qui vise au contraire à protéger tous les citoyens, quelles que soient leurs origines ou leurs croyances. C’est un combat que nous devons à tout prix livrer parce qu’il a pour seul et unique but d’empêcher qu’une violence folle, mise au service d’une idéologie barbare, porte atteinte à notre sécurité et à nos libertés.
Je veux donc vous dire aujourd’hui l’importance de votre rôle et de votre engagement, ainsi que la grande estime que je vous porte. Parce que je sais que vous vous êtes pleinement engagés dans ce combat contre la radicalisation, parce que vous avez répondu présents lorsque les préfets vous ont demandé votre concours, parce que vous êtes résolus à poursuivre votre tâche, de manière toujours plus efficace, quelles que soient les difficultés rencontrées.
Cette journée de réflexion ne constitue sans doute qu’une étape dans le long chemin que nous aurons encore à parcourir ensemble pour gagner ce combat. Je vous demande de ne pas sous-estimer pourtant l’importance de cette rencontre et de contribuer à faire en sorte que nous nous rapprochions aujourd’hui de notre objectif. Et je vous donne rendez-vous ce soir pour écouter le compte-rendu de vos travaux.