Lancement en Normandie de l'expérimentation des voitures-radar conduites par un opérateur externalisé sous le contrôle de l'État

24 février 2017

Emmanuel BARBE, délégué interministériel à la sécurité routière, a présenté ce vendredi  24 février 2017, à la préfecture d'Évreux, les premières voitures-radar conduites par un seul opérateur sur des itinéraires contrôlés depuis un centre de supervision.


Aujourd'hui débute, en Normandie, l'expérimentation qui permettra, au 1er septembre prochain, que la conduite des voitures-radar lancées en 2013 soit confiée à des prestataires privés. Ce test de plusieurs mois est destiné à permettre l'homologation du nouveau système et ne donnera lieu à aucune contravention.

La première voiture-radar conduite par un opérateur privé est programmée pour septembre 2017 en Normandie. Le dispositif d'externalisation sera ensuite progressivement étendu aux autres régions. Ce seront dès lors des entreprises qui fourniront des chauffeurs pour conduire, sous étroit contrôle de l'État, ces véhicules banalisés, comme décidé par le Comité interministériel de la sécurité routière du 2 octobre 2015 (mesure n°2) et dans les conditions précisées par le ministre de l'Intérieur, Bruno LE ROUX, le 8 janvier dernier lors du Conseil national de la sécurité routière (CNSR).

Depuis mars 2013, 383 voitures-radar sont capables de contrôler la vitesse des véhicules tout en roulant dans le flot de la circulation. Ces véhicules banalisés circulent actuellement avec un équipage de deux policiers ou deux gendarmes, dont l'un est affecté à la conduite, l'autre au réglage de la vitesse autorisée à l'endroit traversé. Aucun d'entre eux n'a pour mission de constater l'excès de vitesse : c'est le système embarqué qui s'en charge, sans autre intervention humaine que la détermination par le passager de la vitesse autorisée.

Les voitures-radar destinées à être conduites par des entreprises disposeront d'un mécanisme innovant par rapport aux voitures actuelles : des équipements capables de lire les panneaux de limitation de vitesse permettront au radar de fonctionner de manière autonome, sans aucune intervention du chauffeur, désormais seul présent dans le véhicule.

Cette réforme permettra donc de libérer du temps de travail pour les forces de l'ordre (équivalant à 400 emplois temps plein), qu'elles consacreront à des tâches mieux en rapport avec leur qualification au profit de la lutte contre l'insécurité routière, comme la recherche des conduites en état d'ivresse ou après prise de stupéfiants, la lutte contre la délinquance et la protection de la population. Elle permettra également d'augmenter le temps d'usage des voitures-radar afin d'assurer un meilleur respect des limitations de vitesse sur l'ensemble du réseau.

À cet égard, s'agissant de matériel de mesures de la vitesse en déplacement, des marges de tolérance supérieures ont été retenues : 10 kilomètres/heure en plus de la vitesse autorisée, ou 10% selon ce qui est le plus favorable au contrevenant. Toute personne normalement attentive aux limitations de vitesse peut donc rouler sans crainte d'être verbalisée.

Les entreprises concernées seront rémunérées en fonction du nombre d'heures de conduite effectuées. Ce nombre d'heures de conduite, les trajets effectués ainsi que les plages horaires de contrôle seront fixés par les services de l'État en fonction des critères d'accidentalité locale et ne seront en aucun cas laissés à la libre appréciation des entreprises ou de leurs conducteurs. En aucun cas les entreprises ne seront rétribuées au nombre d'infractions enregistrées.

Lorsque la voiture-radar circulera, son conducteur n'aura aucune indication relative au constat d'infraction par le mécanisme qu'il transporte : il ne saura ni quel véhicule a été photographié, ni combien. Il en va de même pour l'entreprise qui l'embauche, qui ne pourra jamais accéder à la partie concernant les clichés de verbalisation, ni connaître le nombre d'infractions constatées par le biais des véhicules dont il a la charge durant leur conduite (les véhicules, lorsqu'ils ne seront pas utilisés, seront garés dans les locaux de la police ou de la gendarmerie).

Les données enregistrées par les voitures-radar seront envoyées de façon cryptée aux officiers de police judiciaire en charge de la verbalisation. Ces officiers de police judiciaire, qui constatent et valident l'infraction, seront les mêmes que pour les radars fixes et les actuelles voitures-radar : ce sont les policiers et les gendarmes du Centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR) au sein du Centre national de traitement (CNT) situé à Rennes.

Il ne s'agit bien évidemment en aucun cas de déléguer à des sociétés privées des compétences régaliennes. Cela serait interdit par la constitution.

Les nouvelles voitures-radar en détail

La voiture-radar aujourd'hui

Depuis leurs mises en service en 2013, les voitures-radar effectuent des missions avec un équipage de deux policiers ou deux gendarmes qui ne participent en rien aux contrôles de la vitesse. Ceux-ci sont effectués automatiquement par le véhicule. La rédaction et l'envoi des procès-verbaux sont traités directement au Centre national de traitement des infractions de Rennes.

Actuellement les voitures-radar sont conduites par un équipage de deux policiers ou gendarmes. L'un conduit, l'autre modifie sur une tablette les changements de limitation de vitesse qui surviennent sur l'itinéraire emprunté. Aucun ne constate ni n'envoie de PV.

La voiture-radar demain

Les voitures-radar externalisées seront à terme pilotées par un seul opérateur appartenant à une société privée. Pour répondre à ce nouveau mode d'organisation, les véhicules en service doivent subir plusieurs transformations.

Voiture radar

Le véhicule lit les panneaux tout seul et le chauffeur privé ne peut savoir si le flash s'est déclenché. Son seul travail consiste à suivre l'itinéraire pré-programmé pour chaque mission.

Le radar de ce nouveau véhicule est totalement identique à celui de l'ancien : il flashe les véhicules en infraction qui le croisent ainsi que ceux qui le dépassent exactement de la même manière. Les marges de tolérance restent donc inchangées.

Si le radar demeure toujours inséré dans la plaque avant et l'appareil numérique toujours installé sur la planche de bord (voir photo), la tablette devant le siège passager, en revanche, disparaît. Elle permettait, au policier ou au gendarme qui y était assis de modifier les vitesses maximales autorisées durant le parcours. De nouveaux équipements, quant à eux, apparaissent et vont permettre au radar de fonctionner de manière autonome, sans aucune intervention d'un passager ni même du chauffeur présent dans le véhicule :

  • Un navigateur GPS : il permet au conducteur d'afficher l'itinéraire pré-programmé à emprunter lors de sa mission du jour. Le conducteur devra alors suivre le parcours prévu.
  • Quatre caméras (deux à l'avant et deux autres sur la plage arrière) : elles sont installées pour lire les panneaux de signalisation. Elles reconnaissent automatiquement les panneaux de limitation de vitesse, mais également ceux d'entrée ou de sortie d'agglomération. Ces caméras seront par la suite miniaturisées pour une meilleure banalisation de la voiture.

La conduite des voitures-radar par un opérateur privé seul à bord va permettre de dégager l'équivalent de 400 emplois temps plein par an pour les forces de l'ordre et de créer 1 000 postes de chauffeur dans le secteur privé.

Des parcours cartographiés

La mise en place de ce nouveau système implique que chaque parcours contrôlé ait été au préalable spécifiquement cartographié par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN). La comparaison sera donc permanente entre la vitesse enregistrée dans la base de données nationale et celle que détecte la voiture-radar avec la lecture des panneaux. Si ponctuellement ces deux valeurs devaient différer, par exemple après la pose récente d'un panneau, alors le système accorderait automatiquement le bénéfice du doute pour l'usager ... jusqu'à ce que les données concordent plus loin sur le trajet.

À Évreux, une illustration en conditions réelles

Autour d'Évreux, des véhicules radar ont circulé sur les routes du département. Des techniciens, chargés de concevoir les prototypes, les ont conduits et ont réalisé des mesures de vitesse mais sans verbalisation. Les invités ont pu suivre en direct leur parcours depuis la préfecture de l'Eure. Cet essai a permis de montrer que la technologie est acquise et que le système fonctionne.

Pour les besoins de la démonstration, un centre de supervision du prestataire privé et un poste d'exploitation du Centre national de traitement (CNT) à Rennes ont été simulés dans la salle de conférence à la préfecture d'Evreux.

Un centre de supervision pour le prestataire externalisé

Le centre de supervision du prestataire dispose d'une carte animée et permet de localiser plusieurs voitures-radar en circulation dans un territoire à sécuriser.

Carte animée de localisation voitures radar

Apparaissent sur l'écran principal la position actualisée des véhicules, leur progression sur la carte et la vitesse maximale autorisée que chacun contrôle selon le lieu où il se trouve. Un écran de ce type permettra aux opérateurs privés, sélectionnés après un appel d'offres, de superviser en permanence les missions des voitures-radar dont ils auront la charge. Si le chauffeur s'écarte du parcours indiqué, son responsable hiérarchique pourra immédiatement le constater grâce au dispositif de géolocalisation dont le véhicule est équipé en permanence.

Pour les besoins de la démonstration, des écrans annexes sont reliés à des webcams placées en immersion dans des voitures radars.

Démonstration écrans annexes

Ces caméras web ont été installées uniquement pour les besoins de la démonstration du 24 février 2017. Les images retransmises montrent que la voiture-radar reconnaît les panneaux de signalisation et adapte automatiquement la vitesse maximale autorisée sur la route parcourue, comme le font actuellement les forces de l'ordre de façon manuelle.

Dans la voiture-radar en mode externalisé, le chauffeur ne peut en aucune manière savoir si un automobiliste croisé a été flashé car l'ordinateur de bord n'émet pas de signal tandis que le flash infrarouge ne se voit pas à l'œil nu. De même, devant son écran de contrôle, le responsable hiérarchique du chauffeur ignore lui aussi si le radar s'est déclenché. Il ne peut donc pas y avoir d'intéressement aux amendes ni encore de « course au chiffre » pour la société privée chargée de faire rouler les véhicules.

Le Centre national de traitement (CNT) des infractions à Rennes est toujours le seul organisme habilité à traiter les procès-verbaux générés par les véhicules en infraction.

Visuel d'un véhicule en infraction tel qu'il apparaît au CNT

Un dernier poste informatique dans la salle de conférence de la préfecture d'Évreux représente le CNT à Rennes où sont transmis et affichés les messages d'infraction. Les policiers et gendarmes du Centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR) y sont les seuls à pouvoir juger des photos et procéder à la verbalisation. Ces opérations demeurent donc réservées à des agents assermentés. Ceux-ci procèdent aux constatations habituelles à partir des clichés transmis (identification du véhicule, notification et validation) avant l'envoi - ou non - d'un avis de contravention.

L'externalisation de la conduite des voitures-radar

Cette démonstration marque le début d'une expérimentation de plusieurs mois pendant lesquels les voitures-radar modifiées ne relèveront pas d'infraction. Durant cette période, les voitures-radar conduites par les forces de l'ordre continueront de circuler dans la région Normandie.

Dans les prochaines semaines, une consultation sera lancée en vue de sélectionner un prestataire régional au titre d'un marché public. L'entreprise désignée ne pourra être intéressée au montant des amendes et aucune prime ne sera indexée au nombre de flashs. Les véhicules confiés à l'entreprise titulaire du marché resteront pour leur part la propriété de l'État.

La première voiture-radar conduite par un opérateur privé est programmée au 1er septembre 2017 en Normandie. Le dispositif d'externalisation sera ensuite progressivement étendu aux autres régions.