Oise : Attaque chimique sur un petit village gaulois

Exercice NRBC au Parc Astérix © MI/SG/Dicom/J.Groisard

Le 29 septembre dernier, le Parc Astérix a été le théâtre d’un exercice mettant en scène un attentat chimique. L’objectif était de tester le plan départemental NRBC-E (nucléaire, radiologique, bactériologique, chimique, explosif) en matière de secours et d’enquête judiciaire.


En pleine représentation d’un spectacle gallo-romain dans le bâtiment clos de l’attraction « Les Arènes de Lutèce » du Parc Astérix, un individu dépose un sac percé contenant un produit qui s’évapore et atteint le public. Les visiteurs se mettent à crier, tousser, et sortent en suffoquant. Le mouvement de foule gagne la file d’attente et très vite, c’est la panique sur le parc. Immédiatement le service de sécurité prévient le SDI 60. Suspectant un produit chimique, les équipes spécialisées des sapeurs-pompiers sont rapidement appelées en renfort avec leurs moyens d’intervention spécifiques, les CMIC (cellules mobiles d’intervention chimique). En tenue de protection (combinaison, gants, sur-bottes, assistance respiratoire avec cartouche filtrante), les sapeurs-pompiers procèdent à l’extraction des victimes de la « zone d’exclusion » (zone contaminée) vers le PRV (point de rassemblement des victimes) situé à l’extérieur des arènes et dans le sens inverse du vent pour limiter la propagation. Munis de l’AP4C, un appareil portable de contrôle de la contamination qui indique rapidement une catégorie de produit (phosphore, soufre, arsenic ou azote), les sapeurs-pompiers cherchent à connaître la nature du produit pour déterminer le protocole médical à mettre en place. La diode « phosphore » s’allume, le produit est potentiellement du sarin. Cette information implique un besoin essentiel et urgent de décontamination.  

En salle « Idéfix » s’est installé le poste de commandement opérationnel. 

Francis Cloris, sous-préfet de Senlis, enchaîne les points de situation avec tous les correspondants : SDIS 60, associations de sécurité civile, SAMU, police, gendarmerie, collectivités territoriales. La direction des opérations de secours relève du préfet, qui active le plan ORSEC NOVI (nombreuses victimes). Le PSIG (peloton de surveillance et d’intervention) de Chantilly boucle le périmètre de sécurité (500 mètres pour du sarin) et procède à des reconnaissances, toujours en équipement de protection adapté aux risques NRBC. Il découvre un colis suspect à l’intérieur des arènes. Les démineurs de la sécurité civile d’Amiens interviennent alors pour une levée de doute pyrotechnique. « Un démineur effectue une radio du colis suspect, explique Samuel Maréchal, du centre de déminage d’Amiens. Je reçois le retour de l’image sur écran dans le camion. Remarquant des fils et une forme suspecte, je décide de procéder à la destruction du colis. Le démineur à l’intérieur des arènes installe le canon à eau que je déclenche à distance ».  

Les victimes sont triées en fonction de leurs mobilité et symptômes. Les sapeurs-pompiers effectuent la décontamination d’urgence, en leur frottant la peau (mains, visage) avec un « gant poudreur » puis en les déshabillant. Cette première forme de décontamination sèche est indispensable quand il s’agit d’un neurotoxique. Les victimes, protégées d’une couverture de survie, sont ensuite orientées vers une unité mobile de décontamination, où elles sont douchées. Les sapeurs-pompiers sont en mesure de décontaminer ainsi 100 personnes valides par heure, avant leur prise en charge au poste médical avancé (PMA). Dans le même temps, ils identifieront précisément les toxiques incriminés, en l’occurrence du sarin, en l’analysant sur place grâce au véhicule de détection, d’identification et de prélèvement. En cas d’action terroriste avérée, la section anti-terroriste du parquet de Paris se saisit de l’enquête. Les équipes spécialisées des forces de police ou de gendarmerie réalisent les opérations de police scientifique dans le temps de la flagrance en prélevant les traces et indices destinés aux scellés judiciaires.

Floriane Boillot 

Le sarin, un gaz de combat 

Le sarin est un produit neurotoxique de type organophosphoré : il attaque le système nerveux en perturbant l’activité de certains enzymes. Sous forme liquide, visqueuse ou gazeuse, il se transmet par voie respiratoire et en traversant la peau pour passer dans le sang. Très volatile, les mouvements de l’air par la foule ou le vent augmentent sa propagation. L’exposition à ce produit peut entraîner des sueurs abondantes, douleurs abdominales, convulsions, allant jusqu’à l’arrêt cardiaque.

En cas d’attentat au sarin, les équipes médicales sont confrontées à plusieurs difficultés spécifiques, comme en témoigne le médecin régulateur du SAMU de l’Oise : « Il faut pouvoir prendre en charge les victimes sans se contaminer. Or, entre le moment où les victimes sont regroupées au point de rassemblement et celui où elles sont admises en chaîne de décontamination, des antidotes doivent être administrés le plus rapidement possible. »

Du personnel médical formé à travailler en tenue de décontamination doit donc injecter des antidotes aux victimes pour temporiser les effets du sarin avant qu’elles ne soient décontaminées et prises en charge médicalement. Le dispositif prévu dans l’Oise a également tenu compte de retours d’expériences : « L’attentat au sarin dans le métro de Tokyo en 1995 et l’explosion AZF à Toulouse ont montré que lors d’une attaque ou accident de ce type, les victimes qui le peuvent vont tenter de quitter les lieux et se diriger vers un hôpital, avec le risque de contaminer tout le monde ! explique le médecin. Nous avons donc prévu pour cet exercice la projection d’une unité de décontamination hospitalière près de l’hôpital de Senlis avec des équipes prêtes à accueillir des éventuels évacués sauvages ».